La femme prise en adultère

Le monde a suivi avec intérêt les événements au Nigéria il y a plusieurs années quand une femme accusée d’adultère fut condamnée à mort par une cour islamique. Selon la loi du charia instituée dans certains états nigérians, une telle femme devait être lapidée, tuée à coups de pierre. Beaucoup de personnes, au Nigéria comme partout au monde, s’opposèrent à cette décision. Ce ne fut pas seulement des musulmans qui ont participé au débat. Malheureusement, certains qui voulaient commenter la situation d’une perspective chrétienne ont mal présenté l’enseignement de Jésus par rapport à une telle situation. Ils ont donné l’impression qu’il faut non seulement tolérer toute sorte de péché, mais l’approuver. Quelques-uns ont même honoré la femme qui a péché.

Un passage de la Bible auquel beaucoup ont fait appel se trouve en Jean 8.2-11. Dans ce passage Jésus est mis en face d’une femme qui, elle aussi, était accusée d’adultère parmi un peuple dont la loi prescrivait de lapider à mort la personne trouvée coupable de ce péché. Voici le récit :

« Dès le matin, il alla de nouveau dans le temple, et tout le peuple vint à lui. S’étant assis, il les enseignait. Alors les scribes et les pharisiens amenèrent une femme surprise en adultère ; et, la plaçant au milieu du peuple, ils dirent à Jésus : Maître, cette femme a été surprise en flagrant délit d’adultère. Moïse, dans la loi, nous a ordonné de lapider de telles femmes : toi donc, que dis-tu ? Ils disaient cela pour l’éprouver, afin de pouvoir l’accuser. Mais Jésus, s’étant baissé, écrivait avec le doigt sur la terre. Comme ils continuaient à l’interroger, il se releva et leur dit : Que celui de vous qui est sans péché jette le premier la pierre contre elle. Et s’étant de nouveau baissé, il écrivait sur la terre. Quand ils entendirent cela, accusés par leur conscience, ils se retirèrent un à un, depuis les plus âgés jusqu’aux derniers ; et Jésus resta seul avec la femme qui était là au milieu. Alors, s’étant relevé, et ne voyant plus que la femme, Jésus lui dit : Femme, où sont ceux qui t’accusaient ? Personne ne t’a-t-il condamné ? Elle répondit : Non, Seigneur. Et Jésus lui dit : Je ne te condamne pas non plus ; va, et ne pèche plus. »

Quelles sont donc les leçons à dégager de cette histoire ? Nous allons voir tour à tour la faute de la femme, la faute des maîtres de la loi juive qui l’ont conduite devant le Seigneur et le pardon de Jésus.

La faute de la femme

La femme que l’on a amenée devant Jésus avait violé le septième des dix commandements : « Tu ne commettras point d’adultère » (Exode 20.14). Selon Lévitique 20.10 et Deutéronome 22.22 la peine de mort était bien prescrite dans ces cas.

Le Nouveau Testament ne contient pas un code civil pour gouverner une nation comme ce fut le cas pour la loi de Moïse. Le Nouveau Testament ne prescrit pas telle ou telle sanction – amende, emprisonnement, peine de mort, etc. – pour différents crimes. Mais il s’accorde avec l’ancienne loi sur la gravité du péché et la peine que mérite le pécheur. Romains chapitre 1 parle de plusieurs sortes de péchés : l’idolâtrie, les péchés sexuels, l’injustice, l’amour de l’argent, le meurtre, la rébellion envers ses parents, et bien d’autres. Le verset 32 dit, en parlant des hommes pécheurs :

« Et, bien qu’ils connaissent le jugement de Dieu, déclarant dignes de mort ceux qui commettent de telles choses, non seulement ils les font, mais ils approuvent ceux qui les font. » (Romains 1.32)

Certains pensent que l’Église doit combattre la peine de mort, quel que soit le crime, comme si une telle sentence était toujours exagérée. Mais le Nouveau Testament dit, au contraire, que le gouvernement est autorisé par Dieu lui-même à punir les malfaiteurs, même par la peine capitale. Lisez Romains 13.4 :

« Le magistrat est serviteur de Dieu pour ton bien. Mais si tu fais le mal, crains ; car ce n’est pas en vain qu’il porte l’épée, étant serviteur de Dieu pour exercer la vengeance et punir celui qui fait le mal. »

Je le répète, ce n’est pas à l’Église de tuer les malfaiteurs, mais elle doit déclarer aux hommes que s’ils ne se repentent pas, ils connaîtront un sort pire que la mort. Éphésiens 5.5,6 nous avertit :

« Car, sachez-le bien, aucun impudique (celui qui commet le péché sexuel, tel que l’adultère ou la fornication), ou impur, ou cupide, c’est-à-dire idolâtre, n’a d’héritage dans le royaume de Christ et de Dieu. Que personne ne vous séduise par de vains discours ; car c’est à cause de ces choses que la colère de Dieu vient sur les fils de la rébellion. »

Ceux qui commentaient la situation au Nigéria ont dit toutes sortes de choses pour justifier l’acte de la femme. « Cette femme n’était pas heureuse dans son foyer. Elle n’était pas satisfaite. Voilà pourquoi elle a fait ce qu’elle a fait. » Mais le mariage est sacré, étant institué par Dieu lui-même. Le mariage comporte des vœux de fidélité. Il y a un temps pour pardonner, mais nous ne devons pas justifier ou minimiser la gravité du péché.

La femme qui a été amenée devant Jésus avait été prise en flagrant délit d’adultère, trouvée dans l’acte même. Oui, elle méritait bien la mort.

La faute des maîtres de la loi

Mais la femme n’était pas la seule coupable dans cette histoire. Les scribes et pharisiens étaient aussi en faute. Ils agissaient par hypocrisie. Ils présentaient ce cas devant Jésus « pour lui tendre un piège, afin de pouvoir l’accuser » (Jean 8.6). Le souci de ces hommes n’était pas de faire appliquer ou de savoir appliquer les commandements de Dieu dans la loi de Moïse. Si la femme avait été prise en train de commettre l’adultère, c’est que son partenaire dans le péché était connu également. Lui aussi devait être amené et puni. La loi était très claire :

« Si l’on trouve un homme couché avec une femme mariée, ils mourront tous deux, l’homme qui a couché avec la femme, et la femme aussi… Si une jeune fille vierge est financée, et qu’un homme la rencontre dans la ville et couche avec elle, vous les amènerez tous deux à la porte de la ville, vous les lapiderez, et ils mourront. » (Deutéronome 22.22-24)

Mais les maîtres de la loi n’avaient besoin que de la femme, parce que leur seul but était de prendre Jésus dans leur piège et le discréditer. Cette femme n’était pour eux qu’un outil.

En quoi consistait donc le piège ? Les Juifs à cette époque vivaient sous la domination de l’Empire romain. Les Romains leur permettaient de juger des affaires moins importantes, mais se réservaient le droit d’appliquer la peine de mort. Voilà pourquoi les chefs des Juifs seraient contraints plus tard d’amener Jésus auprès du gouverneur romain quand ils voulaient le faire mourir. Si Jésus disait aux Juifs de mettre à mort la femme adultère selon la loi de Moïse, ils pourraient l’accuser devant les Romains de ne pas respecter leur autorité et d’exciter le peuple à leur désobéir. Ils pourraient aussi mettre en cause la compassion de Jésus. Si, par contre, Jésus disait aux Juifs de ne pas mettre la femme à mort, les scribes l’auraient accusé d’un manque de respect pour la loi de Dieu, ou ils auraient dit que Jésus ne prenait pas l’adultère pour un péché grave.

Mais l’hypocrisie de ces hommes se voit aussi dans le fait qu’ils étaient prêts à faire mourir cette femme pour son péché, sans même penser à leurs propres péchés. La Parole de Dieu, en effet, est particulièrement sévère envers ceux qui, avec une arrogance aveugle, méprisent les autres pécheurs sans reconnaître qu’eux aussi, ils sont coupables. Romains 2.1-3,21,22 par exemple, dit ceci :

« Ô homme, qui que tu sois, toi qui juges, tu es donc inexcusable ; car, en jugeant les autres, tu te condamnes toi-même, puisque toi qui juges, tu fais les mêmes choses. Nous savons, en effet, que le jugement de Dieu contre ceux qui commettent de telles choses est selon la vérité. Et penses-tu, ô homme, qui juges ceux qui commettent de telles choses, et qui les fais, que tu échapperas au jugement de Dieu ?… Toi qui prêches de ne pas dérober, tu dérobes ! Toi qui dis de ne pas commettre adultère, tu commets adultère ! »

Peut-être que tout le monde connaît les paroles de Jésus en Matthieu 7.3-5 :

« Pourquoi vois-tu la paille qui est dans l’œil de ton frère, et n’aperçois-tu pas la poutre qui est dans ton œil ? Ou comment peux-tu dire à ton frère, laisse-moi ôter une paille de ton œil, toi qui as une poutre dans le tien ? Hypocrite, ôte premièrement la poutre de ton œil, et alors tu verras comment ôter la paille de l’œil de ton frère. »

Jésus n’a pas dit que la femme ne méritait pas de mourir. Mais en disant « que celui de vous qui est sans péché jette le premier la pierre contre elle », il a obligé ces hommes à faire face à leurs propres faiblesses. Selon une ancienne traduction arménienne de ce passage, quand Jésus s’est baissé pour écrire dans la poussière avec son doigt, il écrivait les péchés de ces hommes : mauvais désirs, visites secrètes chez des prostituées, corruption, méchanceté, ruse, etc. Il les aidait à voir qu’ils étaient aussi coupables que la femme. Ces hommes devaient non seulement s’examiner et se repentir de leurs propres péchés, mais aussi adopter l’attitude recommandée en Jude 22,23, la pitié pour les pécheurs, mais l’horreur de leurs péchés :

« Ayez pitié des uns, de ceux qui doutent ; sauvez-les en les arrachant au feu. Ayez pour les autres une pitié mêlée de crainte, haïssant jusqu’à la tunique souillée par la chair. »

La grâce de Jésus

Nous avons vu la gravité de la faute de la femme adultère et la gravité de l’hypocrisie des maîtres de la loi. Voyons rapidement la grâce de Jésus. Lui, il aurait pu condamner cette femme, jeter contre elle la première pierre, parce qu’il était effectivement sans péché. Il n’aurait pas été hypocrite s’il avait choisi la juger. Jésus ne devait rien à cette femme qui avait violé la loi du Dieu très saint et très juste. Mais Jésus a préféré exercer son droit divin de pardonner les péchés. Il dit à la femme : « Je ne te condamne pas non plus ; va, et ne pèche plus. » Le jour viendra où, selon 2 Thessaloniciens 1.8, Jésus viendra du ciel « au milieu d’une flamme de feu, pour punir ceux qui ne connaissent pas Dieu et ceux qui n’obéissent pas à l’Évangile de notre Seigneur Jésus. » Mais Jésus est venu premièrement pour que les hommes puissent ne pas être condamnés lors du grand jugement. « Dieu, en effet, n’a pas envoyé son Fils dans le monde pour qu’il juge le monde, mais pour que le monde soit sauvé par lui » (Jean 3.17).

Remarquons que la grâce que Jésus offre n’est pas un permis de continuer dans le péché. C’est une occasion de faire un nouveau départ, de se détourner du mal dans lequel on vivait. Loin de dire à la femme : « Tu as péché, mais ça fait rien », Jésus lui dit qu’il faut changer de vie.

Conclusion

Nous sommes tous des pécheurs. Ne soyons pas pressés pour condamner les autres, pour exiger qu’ils soient pleinement punis pour leurs fautes. On nous jugera du jugement dont nous jugeons. Le jugement sera sans miséricorde pour qui n’a pas fait miséricorde.

Mais en même temps, nous ne devons pas minimiser le péché, le justifier ou le prendre à la légère. Dieu est réellement un Dieu d’amour, mais Dieu ne minimise pas le péché. Le péché mérite la mort. Pas seulement le péché de l’adultère, mais mon péché et le vôtre. Dieu prend nos péchés tellement au sérieux qu’il a payé le prix suprême afin de les ôter. À la croix de Christ, Dieu a prouvé à la fois sa haine du péché et son amour pour nous. Paul le dit en Romains 5.8 : « Mais Dieu prouve son amour envers nous, en ce que lorsque nous étions encore des pécheurs, Christ est mort pour nous. » Quand Jésus a fait grâce à la femme prise en adultère, il a montré son amour pour le pécheur. Quand Jésus est mort sur la croix, il a montré la gravité de nos péchés.

B. B.
(Dans Vol. 14, No. 4)

Pardonnez-vous les uns aux autres

Qu’est-ce que le pardon ?

Nous pensons connaître le sens d’un mot aussi simple que « pardonner », mais on rencontre pas mal de fausses conceptions à ce sujet.

Le pardon est plus que le fait de ne pas rendre le mal pour le mal. On pourrait s’abstenir de donner claque pour claque, tout en gardant de l’amertume et de l’hostilité dans son cœur.

Le pardon n’est pas le fait de fermer l’œil sur le péché. Dieu n’ignore pas le péché, et l’homme ne devrait pas l’ignorer non plus. Jésus ne dit pas de l’ignorer. Il dit en Luc 17.3 : « Si ton frère pèche, reprends-le ; et, s’il se repent, pardonne-lui. »

Enfin, le pardon n’est pas le fait de mettre l’offenseur « en liberté surveillée », une situation où nous parlons de combien son acte est inexcusable et promettons l’oublier pourvu que la personne ne commette pas d’autres fautes.

Nous pouvons identifier le pardon en observant ce que Dieu fait quand il pardonne. L’apôtre Pierre employa le mot « effacer » quand il exhorta des Juifs en Actes 3.19 : « Repentez-vous donc et convertissez-vous, pour que vos péchés soient effacés. » Dieu oublie la faute quand il la pardonne. Dieu promet en Hébreux 8.12 : « Je pardonnerai leurs iniquités et je ne me souviendrai plus de leurs péchés. » Il nous traite comme il le faisait avant que nous n’ayons péché, nous accueillant de tout son cœur. Voilà une idée qui ressort clairement de la célèbre parabole du fils prodigue dans l’Évangile de Luc 15.11-32.

Nous pouvons savoir si nous avons réellement pardonné à autrui en nous posant les questions suivantes : (a) Est-ce que je me réjouis intérieurement lorsque j’apprends qu’un malheur frappe celui qui m’a offensé ? (b) Est-ce que je fais exprès pour éviter de me trouver en présence de la personne qui m’a offensé ? (c) Est-ce que je lui parle seulement après hésitation et sous contrainte ? (d) Est-ce que je me souviens de façon précise l’offense que j’ai subie ? M’arrive-t-il de méditer sombrement le tort qu’on m’a infligé ? (e) Si l’occasion se présentait où l’offenseur voulait qu’on prie pour lui, accepterais-je facilement et avec joie de prier Dieu en sa faveur ?

Pourquoi est-il si important de se pardonner les uns aux autres ?

Nous pouvons constater premièrement qu’il s’agit d’un commandement de Dieu. La Bible dit en Colossiens 3.13 :

« Supportez-vous les uns les autres, et, si l’un a sujet de se plaindre de l’autre, pardonnez-vous réciproquement. De même que Christ vous a pardonné, pardonnez-vous aussi. »

Deuxièmement, comme ce même verset le suggère, l’exemple de Jésus-Christ nous pousse à pardonner. Notre Seigneur pria lorsqu’on le mettait à mort : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font » (Luc 23.34). C’est lui qui est notre modèle. Pierre nous rappelle : « Christ aussi a souffert pour vous, vous laissant un exemple, afin que vous suiviez ses traces » (1 Pi. 2.21). Nous suivons son exemple en étant baptisés, en adorant Dieu et en bien d’autres choses. Ne suivrons-nous pas son exemple en pardonnant aux autres ? Étienne, l’un des premiers chrétiens, a pu imiter le Seigneur. Quand ses persécuteurs le lapidaient à mort, il pria : « Seigneur, ne leur impute pas ce péché ! » (Actes 7.60).

Nous devons pardonner parce que nous sommes aussi des pécheurs qui ne pourrions vivre sans recevoir nous-mêmes le pardon. Jésus insista plusieurs fois sur le fait que notre pardon dépend du pardon que nous accordons aux autres. Dans la prière modèle qu’on appelle souvent « le Notre Père », le Seigneur nous apprend à prier : « Pardonne-nous nos offenses, comme nous aussi, nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés. » Puis il explique : « Si vous pardonnez aux hommes leurs offenses, votre Père céleste vous pardonnera aussi ; mais si vous ne pardonnez pas aux hommes, votre Père ne vous pardonnera pas non plus vos offenses » (Matthieu 6.12,14,15).

Plus tard Jésus dit une parabole qui présente cette vérité de façon très mémorable, et qui montre que même celui qui a déjà reçu le pardon de Dieu pour ses péchés peut se voir révoquer ce pardon s’il refuse d’accorder le pardon aux autres. Il dit cette parabole en réponse à une question. Voici le récit en Matthieu 18, à partir du verset 21 :

« Alors Pierre s’approcha de Jésus et lui demanda : « Seigneur, combien de fois devrai-je pardonner à mon frère lorsqu’il péchera contre moi ? Jusqu’à sept fois ?

— Non, lui répondit Jésus, je ne te dis pas jusqu’à sept fois, mais jusqu’à soixante-dix fois sept fois. C’est pourquoi, voici à quoi ressemble le Royaume des cieux : Un roi décida de régler ses comptes avec ses serviteurs. Il venait de se mettre à compter quand on lui amena un qui lui devait soixante millions de pièces d’argent. Cet homme n’avait pas de quoi rendre l’argent ; son maître ordonna alors de le vendre comme esclave et de vendre aussi sa femme, ses enfants et tout ce qu’il possédait, afin de rembourser la dette. Le serviteur tomba à genoux devant son maître pour le supplier : ‘Prends patience envers moi, lui dit-il, et je te paierai tout !’ Le maître en eut pitié : il lui remit sa dette et le laissa partir. Le serviteur sortit et rencontra un de ses compagnons de service qui lui devait cent pièces d’argent. Il le saisit à la gorge et le serrait à l’étouffer en disant : ‘Paie ce que tu me dois !’ Son compagnon tomba à ses pieds et le supplia en ces termes : ‘Prends patience envers moi et je te paierai !’ Mais il ne voulut pas : il le fit au contraire jeter en prison en attendant qu’il ait payé sa dette. Quand les autres serviteurs virent ce qui était arrivé, ils en furent profondément attristés et allèrent tout raconter à leur maître. Alors le maître fit venir ce serviteur et lui dit : ‘Méchant serviteur ! je t’ai remis toute ta dette parce que tu m’as supplié de le faire. Tu devais toi aussi avoir pitié de ton compagnon, comme j’ai eu pitié de toi.’ Le maître était très en colère et il envoya le serviteur en prison pour y être puni en attendant qu’il ait payé toute sa dette. »

Et Jésus ajouta : « C’est ainsi que mon Père qui est au ciel vous traitera si chacun de vous ne pardonne pas à son frère de tout son cœur. » » (Matthieu 18.21-35, FC)

Il faut pardonner, car il est peut-être plus tard que vous ne le pensez. Le Christ peut revenir d’un instant à l’autre (Marc 13.32). Et qui aimerait être trouvé par lui à son retour séparé de son prochain par la haine et la rancune ? Ou bien, l’objet de votre esprit de vengeance et de votre haine peut mourir. Thackeray et Dickens, les deux grands auteurs anglais du 19e siècle, devinrent des rivaux. Après plusieurs années de séparation, ils se rencontrèrent par hasard à Londres, se faisant froidement face l’un à l’autre. Impulsivement, Thackeray se retourna et saisit la main de Dickens, qui fut ému par ce geste. Ils se sont séparés par la suite souriants, l’ancienne jalousie ayant été détruite. Juste quelques jours plus tard Thackeray mourut ; et la prochaine fois que Dickens l’a vu, ce fut lorsqu’il contempla sa forme dans un cercueil. Un écrivain, qui rappelait plus tard cette histoire, dit : « N’est-ce pas toujours mieux de chercher le pardon maintenant ? » Vous-même, vous vous tenez toujours sur le bord de l’éternité ; il est possible que votre mort survienne à n’importe quel moment. Ne mourrez pas comme « un être non pardonné et sans pardon pour les autres ».

Enfin, il faut reconnaître que le refus de pardonner empoisonne toute la vie. Je connaissais une vieille dame qui était pratiquement seule dans la vie, triste, remplie d’amertume. Pourquoi était-elle si malheureuse ? Parce qu’elle n’avait jamais appris à pardonner. À l’âge de soixante-dix-neuf ans, elle caressait toujours le souvenir d’injustices qu’elle croyait avoir subies quand elle n’avait que douze ans ! On avait acheté un vélo pour son grand frère, mais elle n’en avait pas eu. Plus tard, ses parents n’ont pas apprécié l’homme qu’elle avait choisi comme mari. Et puis, une fois, sa sœur lui avait dit telle chose qui l’a blessée et qu’elle n’aurait pas dû dire. Les membres de l’Église ne lui rendaient pas visite dans sa solitude. (Ne mentionnons pas le fait qu’elle non plus ne leur rendait pas visite, et qu’elle était souvent impolie quand ces membres venaient pour s’occuper de ses besoins.) Chaque fois que j’allais la voir, cette dame me récitait les torts qu’elle avait subis de la part des autres. Quelle triste existence ! Le refus de pardonner est réellement une maladie du cœur qui empoisonne toute la vie.

J’avais une tante qui perdit sa petite fille de seize ans dans un accident de voiture. L’accident avait été provoqué par un chauffeur intoxiqué. Ma tante est restée inconsolable jusqu’à sa mort. Elle ne verrait plus sa petite fille, si charmante, si pleine de considération pour les autres, si animée de joie de vivre et si capable d’ensoleiller l’existence de son entourage. Le chauffeur a fait la prison pour avoir causé la mort d’une personne innocente. Mais cela ne suffisait pas pour ma tante. Elle lui envoyait des lettres jusque dans la prison pour lui rappeler à maintes reprises combien il l’avait fait souffrir et combien il ne méritait pas d’être encore en vie. Son refus de pardonner à cet homme l’a maintenue dans un état de deuil pendant des années.

Dans une autre ville, un couple a perdu son fils, abattu par un jeune homme délinquant. Ce couple chrétien se rendit à la prison pour lui exprimer le pardon. Plus tard, lorsque le jeune homme fut relâché, ces parents qui avaient perdu l’enfant qu’ils chérissaient invitèrent le coupable à loger chez eux. Ils l’ont pris comme leur fils adoptif et lui ont payé les études. Ce jeune homme les a aimés en retour, il est devenu chrétien et la vie de tous les trois a été bénie. Quelle différence le pardon fait dans la vie !

Comment pouvons-nous donc cultiver l’esprit du pardon ?

Pour apprendre l’art de pardonner, il faut se débarrasser d’abord de certaines attitudes :

Il y a des gens qui se disent : « Je ne peux pas pardonner. » Mais ne soyons pas injustes avec Dieu. Nous avons déjà vu que le pardon est un commandement. Le Seigneur nous ordonne de le faire et promet que nous n’obtiendrons pas le pardon si nous ne pardonnons pas. Mais Dieu n’exige pas l’impossible ! Au lieu de dire : « Je ne peux pas pardonner », il faut reconnaître qu’en réalité, je refuse de pardonner.

Une autre attitude que l’on rencontre parfois est celle-ci : « Je vais vous pardonner, mais à l’avenir je n’aurai plus de relations avec vous. » Cela fait penser à la personne qui, lorsque vous êtes en train de parler, vous interrompt en disant : « Je ne vous coupe pas la parole, mais… » La personne qui prétend pardonner, tout en ayant l’intention de ne plus avoir de relations avec l’autre, ne comprend pas le sens du pardon. Nous devons pardonner de la même manière que Christ l’a fait. Éphésiens 4.32 nous dit : « Pardonnez-vous réciproquement, comme Dieu vous a pardonné en Christ. »

Une attitude qui ressemble à cette dernière consiste à dire : « Je vous pardonnerai, mais je ne l’oublierai jamais. » C’est comme si l’on « enterrait la hache de guerre » tout en laissant exposée sa manche. C’est comme si l’on balayait la pièce, mais qu’on laissait les balayures juste derrière la porte. Évitez de garder « un dossier » dans votre esprit où sont inscrits les torts que vous avez subis. Dire que nous oublions un acte du passé signifie que nous décidons de ne pas y penser.

Suggestions pratiques

Certes, il n’est pas toujours facile pour nous les êtres humains de pardonner comme Dieu le fait. Qu’est-ce qui peut nous aider à cultiver l’esprit du pardon ? Voici quelques suggestions :

(1) Souvenez-vous que, comme nous l’avons vu, la haine, la mauvaise volonté et la rancune font du mal à leur objet, mais qu’elles font encore plus de mal à celui qui hait.

(2) Vous le trouverez plus facile de pardonner si vous considérez combien Dieu vous a pardonné. Rappelez-vous la parabole du serviteur impitoyable dont la dette énorme fut pardonnée, mais qui n’a pas voulu pardonner la modeste somme que son prochain lui devait. Les torts que nous avons à nous pardonner les uns aux autres sont minimes par rapport au mal que nous avons commis envers notre Créateur.

(3) Un troisième conseil est de demander à Dieu de vous aider à pardonner au coupable. Mais il faut vraiment vouloir pardonner. Il y a parfois une différence entre réciter une prière et prier sincèrement.

(4) En même temps que vous priez Dieu pour vous-même, il faut vous entraîner à prier pour celui qui vous offense. Soyez précis et dites son nom. Jésus a prié pour ceux qui péchaient contre lui ; non pour qu’ils soient punis, mais pour que le pardon leur soit accordé (Luc 23.34). Au moyen de la prière sincère pour l’offenseur, nous parvenons à cultiver l’amour et créer un sentiment qui viendrait autrement avec beaucoup de difficulté. Essayez de parler avec bonté, non seulement quand vous parlez à Dieu, mais aussi quand vous parlez aux autres de la personne qui vous a fait du tort.

(5) Une autre suggestion est de développer l’habitude de chercher à comprendre son prochain. Il y a généralement une cause qui explique pourquoi une personne agit, par exemple, sans courtoisie. Elle n’a peut-être pas reçu une bonne éducation de la part de ses parents ; ou bien elle avait affaire à des pressions incroyables dont vous n’étiez pas au courant ; ou bien on lui a peut-être donné une fausse impression d’une situation, ce qui l’a amené à se comporter de manière offensive. Ce n’est pas que les circonstances excusent le péché, mais il est plus facile de pardonner quand nous reconnaissons que nous aurions peut-être agi de la même mauvaise manière si nous étions à la place de l’autre personne.

Combien de fois devons-nous pardonner ?

Combien de fois faut-il pardonner à son prochain ? Nous avons vu que l’apôtre Pierre pensait que sept fois étaient suffisantes. Certains rabbis au temps de Jésus disaient de pardonner trois fois. Pierre pensait probablement qu’il était généreux en proposant sept fois. Mais Jésus dit : « Je ne te dis pas jusqu’à sept fois, mais jusqu’à soixante-dix fois sept fois » (Matthieu 18.21,22). Il veut dire qu’il ne faut pas garder un registre mental, car le pardon n’est pas une question de mathématique ou de comptabilité, mais d’amour ; et l’amour n’a pas de bornes. Évitons de dire : « Cela ne servira à rien de lui pardonner ; il répétera la faute. » Aussi longtemps et aussi souvent qu’un frère se tournera et dira :« Je me repens », nous devons lui pardonner (Luc 17.3,4).

Qui doit prendre l’initiative pour que le pardon ait lieu ?

Parfois la réconciliation entre deux personnes n’a pas lieu parce que chacun attend que l’autre fasse le premier pas. Selon Matthieu 5.23,24, celui qui est en faute devrait se rendre auprès de l’autre. Jésus dit :

« Si donc tu viens présenter ton offrande à Dieu à l’autel, et que là tu te souviennes que ton frère a quelque chose contre toi, laisse là ton offrande devant l’autel, et va d’abord faire la paix avec ton frère ; puis reviens et présente ton offrande à Dieu. »

Oui, avant que l’offenseur ne puisse adorer bibliquement, il doit d’abord régler les choses avec celui qu’il a offensé. Ainsi, le chemin le plus court vers Dieu pourrait être le chemin vers la maison de votre prochain.

Mais Matthieu 18.15 montre que l’offensé a aussi le devoir de faire le premier pas. Dans ce passage Jésus dit : « Si ton frère se rend coupable à ton égard, va le trouver et montre-lui sa faute, mais en demeurant seul avec lui. S’il t’écoute, tu auras gagné ton frère. » Pourtant, nous avons souvent l’attitude, « Et bien, c’est lui qui a péché contre moi ; que ce soit donc lui qui prenne l’initiative. » Le Seigneur n’était-il pas l’offensé ; cependant n’a-t-il pas quitté le ciel pour chercher et sauver les pécheurs que nous sommes ?

Supposons un cas : Voici le frère Jean et le frère Pierre. Jean pèche contre Pierre. Quand la Bible est suivie, tous les deux prennent l’initiative et se rencontrent à mi-chemin ; la réconciliation s’en suit.

Rappelons-nous aussi que pardonner peut être votre devoir, mais recevoir votre pardon n’est pas mon droit. Nous ne méritons pas d’être pardonnés, ni par Dieu, ni par les autres – c’est pour cela que le pardon est appelé une grâce. En plus, le pardon n’enlève pas toujours toutes les conséquences que je peux avoir à supporter à cause de mon péché. On peut me pardonner d’avoir gaspillé dans l’alcool et les jeux de hasard l’argent qui devait servir aux besoins de ma famille ; mais recevoir le pardon ne restitue pas l’argent que j’ai gaspillé. Être pardonné par une personne dont j’ai volé les biens n’empêche pas toujours que j’expie une peine en prison. Une femme peut pardonner et ne pas garder rancune envers son mari pour avoir commis de l’adultère contre elle, mais la confiance qu’elle avait en lui peut avoir été détruite pour du bon. Bien que le pardon de Dieu me permette d’avoir la vie éternelle au lieu d’être condamné à l’enfer, Dieu ne m’épargnera pas forcément des conséquences de tous mes actes ici sur la terre.

Conclusion

Terminons en faisant remarquer que vous n’aurez pas beaucoup à pardonner si vous refusez d’avoir la sensibilité à fleur de peau. L’amour « ne s’irrite point » selon 1 Corinthiens 13.5. Les petits esprits s’offensent par de petites choses. Pareillement, vous n’aurez pas beaucoup à pardonner si vous vous donnez corps et âme à une grande cause. La vie d’un homme doit toujours avoir un centre. Tant que « soi-même » est le centre de la vie d’une personne, elle sera facilement offensée. Si, par contre, on se perd dans l’œuvre du Seigneur et de son l’Église, on n’aura pas de temps à perdre pour les petites offenses et les insultes imaginées.

Certes, il y a des actes d’injustice dans la vie dont la victime ne peut pas échapper aux conséquences, des actes qui nous coûtent les fruits de plusieurs années de travail, qui nous coûtent la santé ou nos êtres chers. Quoi qu’il en soit, nous pouvons, avec l’aide du Dieu du pardon, parvenir à pardonner, à surmonter la rancune et à vivre la paix dans le cœur.

par Wendell WINKLER
traduit et adapté par B. B.
(Dans Vol. 11, No. 2)


Voir aussi Recevoir le pardon de Dieu.