Quand Dieu interrogea Adam sur le péché qu’il avait commis en mangeant le fruit défendu, ce dernier n’hésita pas d’accuser Ève. Il dit à Dieu : « La femme que tu as mise auprès de moi m’a donné de l’arbre, et j’en ai mangé. » Ève, à son tour, au lieu de reconnaître sa faute, accusa Satan : « Le serpent m’a séduite, et j’en ai mangé » (Gen. 3.12,13). Une doctrine répandue de nos jours permet à tout le monde de rejeter sur autrui la faute de ses péchés. Il s’agit de la doctrine de « la dépravation totale », qui prétend que depuis « la chute » (le péché d’Adam et Ève), la nature de toute personne est corrompue dès sa conception dans le ventre de sa mère.
Une version assez extrême de cette pensée fut propagée par le réformateur protestant Jean Calvin il y a environ 500 ans. Il écrivit : « Tous les hommes sont conçus dans le péché, et naissent les enfants de colère, indisposés à tout bien, inclinés au mal, morts dans le péché, et esclaves du péché. Et sans la grâce régénératrice du Saint-Esprit, ils ne veulent ni ne peuvent retourner à Dieu, corriger leur nature dépravée, ou se disposer à sa correction. » Ceux qui épousent ce point de vue ont l’habitude de dire que l’homme est « totalement dépravé ».
Contrairement à beaucoup de Protestants et d’Évangéliques, l’Église Catholique ne dit pas que la dépravation de l’homme est « totale », mais elle maintient que la nature de l’homme subit un changement. Selon le Catéchisme de l’Église Catholique, « Adam et Ève commettent un péché personnel, mais ce péché affecte la nature humaine qu’ils vont transmettre dans un état déchu. C’est un péché qui sera transmis par propagation à toute l’humanité, c’est-à-dire par la transmission d’une nature humaine privée de la sainteté et de la justice originelles » (#404).
Ne pourrait-on pas dire alors que si nous péchons, c’est par la faute d’Adam et Ève ? Serions-nous vraiment capables de faire le bien, étant nés avec cette nature déchue, corrompue et affaiblie ?
Selon certains enseignants religieux, nous n’en sommes pas capables. Le Catéchisme de l’Église Réformée de France dit que la grâce de Dieu « n’est point à la disposition des hommes. On ne peut même pas la désirer sérieusement. Pourquoi pas ? Parce que tout homme au fond de lui-même est mauvais, détourné des choses de Dieu et son ennemi. Il ne peut rien entreprendre ni désirer qui ne soit marqué de cette tendance naturelle. » Mais que dit la Bible à ce sujet ?
Dieu s’attend à ce que les hommes le cherchent.
Même s’ils ne le font pas toujours comme cela se doit, les hommes sont capables de chercher Dieu. « Il a fait que tous les hommes, sortis d’un seul sang, habitent sur toute la surface de la terre… il a voulu qu’ils cherchent Dieu, et qu’ils s’efforcent de le trouver en tâtonnant, bien qu’il ne soit pas loin de chacun de nous » (Actes 17.26,27). « Il faut que celui qui s’approche de Dieu croie que Dieu existe, et qu’il est le rémunérateur de ceux qui le cherchent » (Hébreux 11.6). Comment Dieu pourrait-il être le rémunérateur de ceux qui le cherchent si, compte tenu de notre dépravation totale, aucun de nous ne serait capable de le chercher ou même de vouloir le chercher ?
Jésus dit aux hommes : « Cherchez, et vous trouverez » (Matthieu 7.7), et « Cherchez premièrement le royaume et la justice de Dieu ; et toutes ces choses vous seront données par-dessus » (Matthieu 6.33). Tant de promesses vaines, si cette doctrine de la dépravation était vraie.
Jésus dit qu’un homme peut vouloir faire la volonté de Dieu.
Jésus dit : « Si quelqu’un veut faire sa volonté, il connaîtra si ma doctrine est de Dieu, ou si je parle de mon chef » (Jean 7.17). Selon la doctrine de la dépravation totale, personne ne pourrait savoir que l’enseignement de Jésus était de Dieu, car personne ne peut vouloir faire sa volonté.
Paul montre que « la chute » n’a pas détruit la conscience de l’homme.
La « chute » n’a évidemment détruit ni la conscience de l’homme ni son sens du bien et du mal : « Quand les païens, qui n’ont point la loi, font naturellement ce que prescrit la loi, ils sont, eux qui n’ont point la loi, une loi pour eux-mêmes ; ils montrent que l’œuvre de la loi est écrite dans leurs cœurs, leur conscience en rendant témoignage, et leurs pensées s’accusent ou se défendent tour à tour » (Romains 2.14,15).
La Bible enseigne qu’il y a des hommes qui, bien que coupables de péché et ayant besoin du pardon, arrivent à faire du bien. Corneille, qui n’était pas encore né de nouveau, est décrit de cette façon en Actes 10.2 : « Cet homme était pieux et craignait Dieu, avec toute sa maison ; il faisait beaucoup d’aumônes au peuple, et priait Dieu continuellement. » La suite de l’histoire montre qu’il avait besoin d’entendre des paroles par lesquelles il serait sauvé (Actes 11.14). Il était donc un pécheur, comme chacun de nous, mais il n’avait certainement pas l’air d’un homme « totalement dépravé ».
La Bible invite les hommes à bien choisir.
« Choisissez aujourd’hui qui vous voulez servir… Moi et ma maison, nous servirons l’Éternel » (Josué 24.15). « Rejetez loin de vous toutes les transgressions par lesquelles vous avez péché ; faites-vous un cœur nouveau et un esprit nouveau. Pourquoi mourriez-vous, maison d’Israël ? Car je ne désire pas la mort de celui qui meurt, dit le Seigneur, l’Éternel. Convertissez-vous donc, et vivez » (Ézéchiel 18.31,32). « Jésus, se tenant debout, s’écria : Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi, et qu’il boive » (Jean 7.37). « Et que celui qui a soif vienne ; que celui qui veut, prenne de l’eau de la vie, gratuitement » (Apocalypse 22.17). Du début à la fin la Bible est remplie d’appels pleins d’amour qui n’auraient aucun sens, qui seraient même cruels, si l’homme perdu n’avait aucune possibilité d’y répondre.
Jésus dit que certains ont le cœur honnête et bon.
Dans le texte qu’on a l’habitude d’appeler la Parabole du Semeur (Luc 8.5-15), Jésus décrit différentes sortes d’auditeurs de la Parole de Dieu et les différentes manières de recevoir cette semence spirituelle. En expliquant ce qui arrive quand la semence tombe dans la bonne terre et porte beaucoup de fruit, le Seigneur dit : « Ce qui est tombé dans la bonne terre, ce sont ceux qui, ayant entendu la parole avec un cœur honnête et bon, la retiennent, et portent du fruit avec persévérance » (Luc 8.15). Évidemment, certains, au lieu d’avoir un cœur dépravé, ont un cœur honnête et bon. L’état de ton cœur dépend de toi : « Garde ton cœur plus que toute autre chose, car de lui viennent les sources de la vie » (Proverbes 4.23).
Notre situation ne diffère pas fondamentalement de celle d’Adam.
En fait, tout comme Adam ne fut pas créé mauvais, pourtant il céda à la tentation et choisit le mal, nous autres, nous sommes tentés et devons choisir soit de céder soit de résister. Le diable emploie souvent les mêmes tactiques contre nous que ceux par lesquels il a séduit Ève : « la convoitise de la chair, la convoitise des yeux, et l’orgueil de la vie » (1 Jean 2.16; voir Gen. 3.6). Au lieu d’avoir une nature différente de celle d’Adam, nous sommes tentés de la même manière et devons faire de notre mieux pour résister.
Oui, nous finissons tous par pécher, mais nous devons en accepter humblement la responsabilité. Nous devons aussi prendre du courage dans la certitude que nous sommes capables de nous tourner vers Dieu et de croire à son Évangile pour être sauvés.
La puissance de Dieu pour le salut
Liée à cette idée de dépravation est une doctrine corollaire qui ne fait pas honneur à la Parole de Dieu. Cette doctrine prétend que, compte tenu de notre état déchu, le Saint-Esprit doit toucher notre cœur directement et nous amener lui-même à croire en Jésus. Le catéchisme de l’Église Réformée de France exprime l’idée de cette façon : « Nous ne pouvons pas croire en Jésus-Christ par nos propres forces… La foi en Jésus-Christ est l’œuvre directe de Dieu lui-même en nous… Notre foi est le miracle du Saint-Esprit au-dedans de nous… Dieu nous place en face de son Fils mais ne nous laisse pas conclure librement ce que nous allons en penser. S’Il nous laissait libres à ce moment-là, Il nous perdrait sans aucun doute, car de nous-mêmes nous sommes fermés à la grâce et ennemis de Dieu. »
Il est certainement vrai que l’homme ne peut pas se sauver lui-même par ses propres efforts. Il ne peut jamais faire assez de bonnes œuvres pour effacer un seul péché. Sans que Dieu ne prenne l’initiative, aucun pécheur n’aurait le salut. Mais Dieu a bien pris l’initiative : « Dieu prouve son amour envers nous, en ce que, lorsque nous étions encore des pécheurs, Christ est mort pour nous » (Romains 5.8). Cette initiative, il l’a prise en faveur de tous les hommes, car « Dieu ne fait pas acception de personnes » (Actes 10.34). Jésus a donc ordonné que la repentance et le pardon des péchés soient prêchés à toute la création (Luc 24.47; Marc 16.15).
Nous ne devons pas considérer la Parole de Dieu comme une « lettre morte » qui n’a aucun pouvoir de toucher un cœur si Dieu n’y met pas la main. L’Évangile est « la puissance de Dieu pour le salut de quiconque croit » (Romains 1.16). « La parole de Dieu est vivante et efficace, plus tranchante qu’une épée quelconque à deux tranchants » (Hébreux 4.12). Pierre rappelle aux chrétiens : « Vous avez été régénérés, non par une semence corruptible, mais par une semence incorruptible, par la parole vivante et permanente de Dieu… et cette parole est celle qui vous a été annoncée par l’Évangile » (1 Pierre 1.23,25).
Le Saint-Esprit convainc les hommes du péché (Jean 16.8), mais au lieu de toucher directement les cœurs, il agit au moyen d’un instrument, son « épée » qui est la Parole inspirée (Éphésiens 6.17). « La foi vient de ce qu’on entend, et ce qu’on entend vient de la parole de Christ » (Romains 10.17; voir aussi Jean 20.30,31).
Il n’y a pas d’appel de Dieu en plus de l’Évangile. C’est par l’Évangile que l’on est tous appelé (2 Thessaloniciens 2.14). Si tous les hommes n’acceptent pas l’Évangile, la faute n’est ni à une nature totalement dépravée ni à Dieu, qui n’aurait pas envoyé son Esprit pour leur donner la foi. Ce n’est pas que Dieu fait du favoritisme. La faute est bien à l’homme, un être libre. Jésus dit à certains : « Vous ne voulez pas venir à moi pour avoir la vie » (Jean 5.40). Nous ne devons pas simplement attendre que Dieu ait pitié de nous et nous accorde la foi ; il nous tend le bouée de sauvetage – saisissons-le ! Nous en sommes capables !
Il n’est pas trop difficile de reconnaître que tous les hommes sont pécheurs – nous voyons nos propres défauts et ceux des autres. Dire, par contre, que l’homme « non régénéré » ne peut rien entreprendre ni désirer qui ne soit marqué de ses mauvais penchants semble bien exagéré. Nous voyons quand même des actes d’héroïsme, de générosité, de tendresse, de fidélité dans les circonstances les plus difficiles, et bien d’autres preuves de vertu. Quels arguments, tirés de la Bible, les partisans de la dépravation totale emploient-ils pour soutenir leur croyance ? Voici les deux les plus courants :
« Par nature enfants de colère »
B. B.
(Dans Vol. 15, No. 3)