Noël

Quand quelqu’un ose remettre en question le bien-fondé d’une tradition très aimée, il court le risque d’être l’objet d’une certaine hostilité. L’émotion favorable qui s’attache à certaines pratiques traditionnelles est parfois si forte que l’on a du mal à aborder le sujet de ces pratiques de façon objective. On rencontre cette attitude même parmi des gens qui reconnaissent en général l’importance de suivre la Parole de Dieu plutôt que les pensées humaines. Ce n’est donc pas tout le monde qui accepterait d’entreprendre une étude qui risque de ne pas confirmer toutes leurs croyances et appuyer leurs différentes pratiques en ce qui concerne des fêtes religieuses comme Noël, une fête que des millions de personnes ont aimée ardemment depuis leur enfance.

Mais quant à nos lecteurs, « quoique nous parlions ainsi, bien-aimés, nous attendons, pour ce qui vous concerne, des choses meilleures et favorables au salut » (Hébreux 6.9). Nous sommes confiants que vous suivrez le conseil de 1 Thessaloniciens 5.21,22 : « Examinez toutes choses ; retenez ce qui est bon ; abstenez-vous de toute espèce de mal. » Vous aurez « des sentiments nobles » comme ceux des Juifs de Bérée qui « examinaient chaque jour les Écritures pour voir si ce qu’on leur disait était exact » (Actes 17.11). Conscients du fait que Jésus accusa d’autres adorateurs de Dieu « d’abandonner le commandement de Dieu et d’observer la tradition des hommes » (Marc 7.8), vous reconnaîtrez que le danger de tomber dans la même erreur est réel, et que l’on ne peut pas se permettre de perdre son objectivité.

Un silence surprenant

Aux yeux du monde l’un des jours de l’année les plus importants pour les chrétiens est sans aucun doute la fête de Noël, censée marquer la naissance de Jésus-Christ. Beaucoup passent des semaines à préparer ce jour par les activités de l’Avent et l’organisation d’une grande variété d’activités et de spectacles offerts dans les églises et d’autres lieux publics. On s’attendrait donc à trouver un enseignement plus ou moins approfondi dans les pages du Nouveau Testament concernant ce « jour saint ».

En réalité, la Bible garde un silence absolu concernant une quelconque célébration de l’anniversaire de naissance du Seigneur Jésus, qu’on la désigne par le nom de Noël ou par une autre appellation. Certes, les Évangiles de Matthieu et de Luc nous parlent de la naissance de Jésus à Bethléhem, mais aucun passage ne suggère que les premiers chrétiens marquaient l’anniversaire de ce jour de quelque manière que ce soit. Ni Jésus, ni ses apôtres, ni les autres auteurs inspirés n’ont demandé aux hommes d’observer la Noël ; aucun verset n’indique le jour de l’année, ni même le mois, où Jésus est né ; aucun passage ne contient des instructions sur la manière prescrite par Dieu pour sanctifier ce jour. Face à cette réalité, nul ne peut nier qu’il s’agit d’une observance d’origine humaine.

« C’est la pensée qui compte » ?

Mais est-ce qu’il est important de savoir si cette fête a été ordonnée par Dieu ? Ce qui compte, c’est le désir d’honorer notre Sauveur et de manifester notre joie à l’égard de sa venue dans ce monde condamné par le péché, n’est-ce pas ? Pas forcément. Oui, Dieu voit nos bonnes intentions et les apprécie, mais ce n’est pas tout ce que des hommes proposent de faire pour lui qui est selon sa volonté. Le roi David voulut construire un temple à l’honneur de son Dieu. Mais son fils Salomon explique en 1 Rois 8.17-19 que Dieu avait d’autres idées là-dessus :

« David, mon père, avait l’intention de bâtir une maison au nom de l’Éternel, le Dieu d’Israël. Et l’Éternel dit à David, mon père : Puisque tu as eu l’intention de bâtir une maison à mon nom, tu as bien fait d’avoir eu cette intention. Seulement, ce ne sera pas toi qui bâtiras la maison ; mais ce sera ton fils. »

Quand un désir de faire honneur à Dieu vient d’un cœur sincère, Dieu le sait et peut en éprouver un certain plaisir. Mais cela ne change pas le fait que c’est sa volonté qui importe, et ce qui est sûr de lui plaire, c’est quand nous obéissons à ses commandements. Les hommes investissent parfois (ou gaspillent plutôt) beaucoup de temps, d’effort et d’argent pour faire ce que Dieu n’a jamais demandé. Comme le prophète Samuel dit à Saül :

« L’Éternel trouve-t-il du plaisir dans les holocaustes et les sacrifices, comme dans l’obéissance à la voix de l’Éternel ? Voici, l’obéissance vaut mieux que les sacrifices, et l’observation de sa parole vaut mieux que la graisse des béliers. » (1 Samuel 15.22)

Un autre roi dans l’histoire juive, du nom d’Ozias, voulut brûler des parfums sur l’autel des parfums dans le temple de Jérusalem. C’était, bien sûr, un acte d’adoration, mais un acte que la loi de Dieu n’avait pas autorisé le roi à accomplir. Aucune loi ne l’interdisait explicitement ; les sacrificateurs pouvaient le faire, mais aucun commandement de l’Éternel n’autorisait les autres Israélites à rendre ce service sacré. C’est pour cela que les sacrificateurs dirent au roi :

« Tu n’as pas le droit, Ozias, d’offrir des parfums à l’Éternel ! Ce droit appartient aux sacrificateurs, fils d’Aaron, qui ont été consacrés pour les offrir. Sors du sanctuaire, car tu commets un péché ! Et cela ne tournera pas à ton honneur devant l’Éternel Dieu. » (2 Chroniques 26.18)

Pendant qu’ils parlaient, Dieu lui-même frappa Ozias de lèpre à cause de son péché présomptueux. Les bonnes intentions sont importantes, mais je dois avoir l’humilité de vérifier que ce que je me propose de faire en l’honneur de Dieu, c’est ce que Dieu veut que je fasse pour lui.

Le péché d’aller plus loin

On pourrait raisonner qu’il est possible de faire pour Dieu ce qu’il n’a pas demandé, sans pour autant lui désobéir. Mais cette façon de raisonner est dangereuse à la lumière des avertissements clairs dans les Écritures :

« Vous n’ajouterez rien à ce que je vous prescris, et vous n’en retrancherez rien ; mais vous observerez les commandements de l’Éternel, votre Dieu, tels que je vous les prescris. » (Deutéronome 4.2)

[Remarquez que le contraire de « ne rien ajouter et n’en rien retrancher », c’est d’observer les commandements tels que Dieu nous les donne.]

« N’ajoute rien à ses paroles, de peur qu’il ne te reprenne et que tu ne sois trouvé menteur. » (Proverbes 30.6)

« C’est en vain qu’ils m’honorent, en enseignant des préceptes qui sont des commandements d’hommes. » (Matthieu 15.9)

« … afin que vous appreniez… à ne pas aller au-delà de ce qui est écrit. » (1 Corinthiens 4.6)

« Et quoi que vous fassiez, en parole ou en œuvre, faites tout au nom du Seigneur Jésus. » (Colossiens 3.17)

[Peut-on faire « au nom du Seigneur » ce que le Seigneur n’a jamais autorisé ?]

« Quiconque va plus loin et ne demeure pas dans l’enseignement de Christ n’a point Dieu ; celui qui demeure dans cet enseignement a le Père et le Fils. » (2 Jean 9)

[Est-il possible qu’une pratique que ni Jésus ni ses porte-parole inspirés n’ont jamais mentionnée fasse partie de l’enseignement de Christ ?]

Une obligation sans que les apôtres le sachent ?

Il est reconnu par tous les historiens, qu’ils soient religieux ou pas, que l’on ne fêtait pas la naissance de Jésus pendant les trois premiers siècles du christianisme. « Selon la tradition catholique, c’est le pape Libère qui, en 354, aurait institué la fête de la Nativité à Rome le 25 décembre, date du Natalis Invicti ; il aurait également codifié les premières célébrations » (article de Wikipédia sur la Noël). La fête fut célébrée à Constantinople pour la première fois en 379 et à Antioche en 388. Ce n’est qu’en 506 que le concile d’Agde fait de Noël une fête d’obligation.

« L’Église (catholique) nous fait un devoir grave d’assister à la Messe… aux quatre fêtes d’obligation. Aussi, manquer la Messe ces jours-là (ou la veille en soirée de ces jours-là) sans un motif très sérieux et manifeste, constitue un péché mortel. Car c’est là un outrage à Dieu… » (Manuel d’instruction et d’éducation religieuse : Les commandements de l’Église)

Il est surprenant, n’est-ce pas, que la non-observation d’une fête qui était inconnue aux apôtres et à tous les premiers chrétiens soit un acte qui puisse séparer un fidèle de son Dieu et le condamner éternellement ! Même parmi des protestants, qui ne parlent pas de « péchés mortels » et « péchés véniels », les gens ont l’idée qu’il est plus grave de ne pas aller à l’église à Noël que de négliger le culte d’un « dimanche ordinaire ». Comme les Juifs du temps de Jésus, beaucoup sont tombés dans l’erreur d’élever les traditions et les commandements des hommes au-dessus de la Parole de Dieu (Marc 7.6-8).

Dieu nous a révélé ce qui est nécessaire

On nous pose parfois la question : « Ne pensez-vous pas que nous devrions célébrer une fête pour rappeler la naissance du Christ ? » En fait, peu importe ce que nous pensons là-dessus. 2 Pierre 1.3 nous dit que Dieu « nous a donné tout ce qui contribue à la vie et à la piété ». Tout ce que j’ai besoin de savoir afin de servir Dieu et lui plaire a été révélé dans la Bible. Si Dieu voulait qu’on observe une fête comme Noël, il nous l’aurait certainement dit ! Instituer une telle observance et demander aux hommes de la respecter, c’est être présomptueux et parler à la place de Dieu.

La conclusion de réformateurs

Il est instructif de constater que bon nombre de conducteurs de la Réforme protestante, y compris Calvin, Zwingli, Farel, Knox et d’autres, reconnurent qu’un retour à la Bible exigeait l’abandon de toutes sortes de pratiques étrangères à la Bible, y compris le culte des images, les vœux de célibat pour le clergé, la prière pour les morts, et oui, les différentes fêtes, telles que Noël, Épiphanie, Ascension, Assomption, et les jours consacrés aux divers saints. Ils recommandaient le dimanche comme seul « jour saint » pour le chrétien. Jusqu’au début du vingtième siècle, bon nombre de dénominations protestantes, y compris les presbytériens, les quakers, les baptistes et d’autres ne marquaient pas du tout la fête de Noël. En 1871 par exemple, le célèbre prédicateur baptiste, Charles Spurgeon, dit dans son sermon du 24 décembre :

« Nous n’avons pas d’égard superstitieux pour les temps et les saisons… nous ne trouvons aucune justification dans les Écritures pour l’observance de l’anniversaire de naissance du Sauveur ; et, par conséquent, cette observance n’est qu’une superstition, n’ayant pas été autorisée par Dieu. »

Si nous voulons respecter réellement l’autorité de la Bible et nous garder d’introduire dans l’adoration de Dieu les traditions humaines et les pratiques qui ne viennent pas de Dieu, cette question est déjà réglée. Aucun passage biblique ne soutient l’observance de la fête de Noël dans les Églises. Ceux qui veulent parler là où la Bible parle et se taire là où la Bible se tait ne peuvent donc pas recommander une telle observance.

Il reste, cependant, d’autres points qu’il vaut la peine de traiter.

Le 25 décembre, n’est-ce pas quand même l’anniversaire du Seigneur ?

Nous avons déjà établi que la fête de Noël remonte seulement jusqu’au milieu du quatrième siècle. Étant donné que personne ne connaissait la vraie date de naissance de Jésus, les hommes ont, bien sûr, eu l’idée de célébrer sa naissance avant de fixer le jour de la fête. Pour certains c’était le 20 mai. Pour d’autres, c’était le 6 avril. D’autres encore avançaient le mois de septembre. On pencha quelque temps pour le 6 janvier. On finit par se mettre d’accord sur le 25 décembre. Il y a une quasi-unanimité sur le point suivant :

« Cette date est entièrement conventionnelle, et n’a rien d’un « anniversaire ». Elle aurait été fixée pour coïncider avec la fête romaine du Sol Invictus (soleil invaincu), célébrée à cette date à l’instar de la naissance du dieu Mithra, né un 25 décembre ; le choix de cette fête permettait une assimilation de la venue du Christ – « Soleil de justice » – à la remontée du soleil après le solstice d’hiver. L’Église a fixé la célébration de Noël au moment de la fête païenne du solstice d’hiver. » (Wikipédia)

Selon une publication catholique en anglais (The New Question Box),

« Il est apparemment gênant pour certaines personnes que la date de Noël trouve ses origines dans une fête païenne. Quoi qu’il en soit, c’est la meilleure explication que nous avons pour le choix du 25 décembre comme jour de célébration de la naissance de Jésus. » (p. 28,29)

Beaucoup ont fait la remarque que même si nous ne pouvons pas savoir exactement quel jour Jésus est né, nous pouvons être assez certains qu’il n’est PAS né en décembre, au beau milieu de la saison pluvieuse en Palestine. En effet, le seul indice biblique de la période de l’année où le Seigneur est né nous dit, en Luc 2.8 : « Il y avait, dans cette même contrée, des bergers qui passaient dans les champs les veilles de la nuit pour garder leurs troupeaux. » Or, il est bien connu que les bergers dans ces zones ne passent pas les nuits avec les troupeaux dans les champs pendant les mois de mauvais temps, qui ne prennent fin qu’en mars.

Quelle est l’origine des diverses traditions associées à la Noël ?

Mais ce n’est pas seulement la date où l’on observe Noël qui doit son origine à des fêtes païennes. De très nombreuses coutumes associées à Noël remontent à des pratiques préchrétiennes chez les Romains, les Celtes, les Vikings, les Norvégiens et bien d’autres peuples païens. Adopter et adapter les coutumes des païens était une politique consciente de l’Église catholique. Un exemple parmi plusieurs se trouve dans une lettre adressée par le Pape Grégoire à l’abbé Mellitus en Grande-Bretagne vers l’an 606 :

« Il ne faut en aucun cas détruire les temples des idoles du peuple. On peut détruire les idoles elles-mêmes, mais il faut asperger les temples d’eau bénite, y dresser des autels et déposer des reliques… De cette façon, nous espérons que le peuple, en voyant que leurs temples ne sont pas détruits, abandonnera son erreur, se rassemblant plus facilement dans leurs lieux habituels, et parviendra à connaître et adorer le vrai Dieu. Et puisqu’ils ont la coutume de sacrifier des bœufs aux démons, qu’on y substitue quelque autre cérémonie, telle qu’une fête à l’honneur des saints martyrs dont on y aurait déposé les reliques. »

Cette approche semble tout le contraire de l’attitude que Dieu recommanda aux Israélites qui entraient dans le pays de Canaan au temps de Moïse : « Vous détruirez tous les lieux où les nations que vous allez chasser servent leurs dieux, sur les hautes montagnes, sur les collines, et sous tout arbre vert » (Deutéronome 12.2). Certes, la situation des Israélites qui prenaient possession d’un pays par la force militaire n’est pas la même que celle de l’Église qui cherche à convertir des populations par la prédication de l’Évangile de Christ. La leçon à tirer de l’exemple des Israélites, c’est qu’une rupture totale d’avec la religion païenne est nécessaire. Le mélange des anciennes pratiques et de la nouvelle foi n’est pas du tout souhaitable. Plus loin dans le même chapitre, Dieu dit au sujet des nations païennes de Canaan :

« Garde-toi de te laisser prendre au piège en les imitant, après qu’elles auront été détruites de devant toi. Garde-toi de t’informer de leurs dieux et de dire : Comment ces nations servaient-elles leurs dieux ? Moi aussi, je veux faire de même. Tu n’agiras pas ainsi à l’égard de l’Éternel, ton Dieu ; car elles servaient leurs dieux en faisant toutes les abominations qui sont odieuses à l’Éternel… Vous observerez et vous mettrez en pratique toutes les choses que je vous ordonne ; vous n’y ajouterez rien, et vous n’en retrancherez rien. » (Deutéronome 12.30-32)

Encore nous voyons le même principe : Dieu, dans sa Parole, fournit aux hommes toutes les instructions nécessaires pour le servir de façon acceptable à ses yeux. Il n’y a pas besoin de rechercher auprès des autres religions des pratiques et des ordonnances pour compléter ce que Jésus et ses apôtres nous ont laissé dans le Nouveau Testament. Au lieu d’enrichir la vraie religion, nous risquerions de rendre notre culte inutile.

Une question de choix personnel ?

Certains chrétiens se disent que la question des jours saints relève du domaine de la liberté personnelle. Après tout, l’apôtre Paul n’a-t-il pas écrit en Romains 14.5 : « Tel fait une distinction entre les jours ; tel autre les estime tous égaux. Que chacun ait en son esprit une pleine conviction » ?

Si nous ne plaçons pas ce verset dans son contexte, nous risquons de semer de la confusion. En effet, tous les jours ne sont pas pareils si un jour de la semaine est désigné comme « le jour du Seigneur » (Apocalypse 1.10). Tous les jours ne sont pas identiques pour le chrétien si un jour est précisé pour certains actes d’adoration : « Pour ce qui concerne la collecte en faveur des saints… que chacun de vous, le premier jour de la semaine, mette à part… » (1 Corinthiens 16.1,2) ; « Le premier jour de la semaine, nous étions réunis pour rompre le pain » (Actes 20.7). On peut ajouter que Paul ne semble pas considérer l’observance des jours saints comme un sujet d’indifférence quand il écrit aux Galates : « Vous observez les jours, les mois, les temps et les années ! Je crains d’avoir inutilement travaillé pour vous » (Galates 4.10,11).

Un regard attentif au contexte de Romains 14 révèle que Paul ne parle ni des fêtes « chrétiennes » telles que Noël et Pâques (qui n’existaient même pas à son époque), ni de dimanche comme jour d’adoration des chrétiens, ni de fête quelconque qui serait célébrée de façon collective dans les assemblées. Le scénario le plus probable est que certains chrétiens d’origine juive continuaient d’observer dans leurs vies privées certains aspects de la loi mosaïque, bien qu’ils aient été dégagés de cette loi. (L’apôtre Pierre, par exemple, n’avait rien mangé « d’impur » plusieurs années après que la loi qui imposait ces restrictions alimentaires avait été clouée à la croix de Christ – Actes 10.14; Colossiens 2.14-17.) Un chrétien qui comprenait qu’il n’avait plus besoin de se conformer aux lois alimentaires ou de rester à la maison le jour du sabbat ne devait pas mépriser son frère ou l’influencer à violer sa conscience. Et le chrétien juif qui continuait de garder de tels préceptes ne devait pas juger son frère qui, conformément à l’Évangile, les avait mis de côté.

Si ce chapitre s’applique à la question de Noël, ce n’est pas dans le sens d’autoriser l’introduction de fêtes religieuses dans la vie de l’Église selon la fantaisie des hommes, sans qu’elles soient autorisées par la Parole de Dieu. C’est plutôt dans ce sens : si un chrétien, à son propre niveau personnel, choisit de consacrer un jour pour se rappeler et marquer d’une manière particulière la naissance de Christ (ou tout autre événement biblique), il peut bien le faire ; les autres n’ont pas besoin de le juger. Mais qu’il se garde d’imposer aux autres ce qui n’est qu’un principe personnel que Dieu n’a nulle part recommandé aux hommes.

De nombreux chrétiens traitent Noël comme une fête familiale ou nationale. Ils profitent du jour de repos offert par leurs employeurs pour se retrouver en famille ou avec des amis. Ils mangent un bon repas et échangent des cadeaux. Ils participent à certaines activités de la saison, comme font de nombreuses personnes qui ne sont pas du tout religieuses. Ils ont le droit de faire ainsi s’ils le veulent, sans être jugés. Mais ils n’enseignent pas à leurs enfants que tout cela est pour l’anniversaire de Jésus, et ils n’introduisent pas dans leurs assemblées une fête qui n’a tout simplement rien à voir avec la volonté de Dieu pour son peuple.

B. B.
(Dans Vol. 12, No. 1)

La liberté chrétienne et la division

Introduction

La division est un fléau parmi les chrétiens qui est souvent le fruit de la fausse doctrine.

« Quelques-uns abandonnent la foi pour s’attacher à des esprits séducteurs et à des doctrines de démons par l’hypocrisie de faux docteurs. » (1 Timothée 4.1,2)

Lorsque cela arrive, la division peut être inévitable :

« Car il faut qu’il y ait aussi des sectes parmi vous, afin que ceux qui sont approuvés soient reconnus comme tels au milieu de vous. » (1 Corinthiens 11.19)

Le Seigneur a reproché les Églises de Pergame et de Thyatire pour avoir toléré dans leur sein des gens qui s’étaient donnés à la fausse doctrine (Apocalypse 2.14,15,20). Les fausses doctrines doivent être identifiées, et il faut « marquer » ceux qui suscitent des divisions en les enseignant (1 Timothée 4.1-6; Romains 16.17,18; Tite 3.10,11; 2 Jean 9-11).

Mais la division et la discorde viennent trop souvent, non pas parce qu’il y a égarement de la vérité biblique, mais parce que les chrétiens manquent de la patience, de l’humilité et de l’amour fraternel. Il y a des aspects de la vie chrétienne où Dieu a laissé à chacun une certaine liberté, où il n’y a pas de modèle éternel auquel chaque chrétien et chaque assemblée doivent se conformer. On peut trouver une diversité de points de vue et de pratiques sans que cela soit un sujet de division. Mais il faut que certaines attitudes soient cultivées parmi nous pour que l’amour et l’harmonie soient préservés.

Un chapitre-clé

En Romains 14 Paul présente les attitudes qui doivent prévaloir parmi les chrétiens quand il y a des différences parmi eux concernant ce qui ne fait pas l’objet d’un commandent du Seigneur. Dans les exemples cités par Paul dans ce chapitre, il s’agit des actions des chrétiens en tant qu’individus et non pas des actions de l’Église collectivement. Bien que les principes qu’il donne puissent avoir des applications en ce qui concerne la manière de faire le culte du dimanche ou la manière de dépenser l’argent dans la caisse de l’assemblée, Paul traite ici des décisions personnelles, comme, par exemple, si l’on va manger un certain aliment.

En fait, puisqu’il s’agit de questions où Dieu nous a laissé de la liberté, ce sont des actions qui ne sont pas en elles-mêmes des péchés. Une personne qui comprend la liberté que Dieu lui a accordée sait qu’elle peut faire certaines choses sans que ce soit un péché. Une autre personne peut pour diverses raisons croire, à tort, qu’elle ne doit pas faire ces choses. Cette dernière personne est identifiée dans ce passage comme celle qui est « faible ». Elle n’a pas encore une foi forte, une ferme conviction qu’elle a le droit de faire les choses en question. Elle peut aussi se croire obligée de faire ce qu’elle est libre de ne pas faire étant en Christ.

Dans les douze premiers versets du chapitre, nous trouvons le principe suivant :

Il ne faut pas se juger les uns les autres en matière d’opinion

Le premier verset a été traduit de plusieurs manières, mais la traduction la plus littérale est celle de Darby : « Or quant à celui qui est faible en foi, recevez-le ; non pas pour la décision de questions [douteuses]. » Le mot « décision » (« disputer » dans la Segond) est employé pour un mot grec qui parle de l’acte de distinguer, discerner, juger, ou prononcer un jugement. « Questions [douteuses] » (« opinions » dans la Segond) traduit un mot qui signifie « raisonnements » et qui est employé pour se référer à la pensée d’un homme qui réfléchit en lui-même sur une décision à prendre. Le mot peut même porter l’idée d’hésitation ou de doute.

Le sens du verset est qu’il faut recevoir comme frère celui qui a des doutes que nous n’avons pas, celui qui n’a pas encore compris le sens de la liberté chrétienne. Les convictions personnelles ne lui permettent pas de faire certaines choses que nous reconnaissons comme permises en Christ, ou bien ses convictions le poussent à se voir sous des obligations qui ne sont pas réelles. Il faut recevoir ce frère sans le condamner parce que sa conscience est trop sensible.

Dans le deuxième verset, Paul identifie le genre de « questions » ou « opinions » qu’il a en vue. « Tel croit pouvoir manger de tout : tel autre, qui est faible, ne mange que des légumes. » Certains ne reconnaissaient pas leur droit de manger de tout et décidaient en eux-mêmes de ne manger que des légumes. Paul ne dit pas pour quelle raison un chrétien aurait pris la décision d’être végétarien. Certains simplifiaient le respect de la distinction entre aliments purs et impurs faite dans la loi de Moïse en ne mangeant pas de la viande du tout (voir Daniel 1.8-12). D’autres encore, pensaient peut-être à la possibilité de manger, sans le savoir, de la viande qui avait été offerte en sacrifice à une idole. En effet, une grande partie de la viande vendue dans les marchés à l’époque avait d’abord été consacrée dans un temple païen. Qu’en est-il de ces idées concernant les aliments ?

Faut-il s’abstenir des aliments déclarés impurs dans l’Ancien Testament ?

Pour la question des aliments purs et impurs selon la loi mosaïque, plusieurs passages démontrent que ces lois ont été abrogées ou annulées quand Jésus est mort sur la croix. (Voir, par exemple, Colossiens 2.14-17 et Hébreux 9.9,10.) Selon l’Épître aux Galates, imposer ces lois aux chrétiens ou en faire une condition du salut serait pervertir l’Évangile et se séparer du Christ.

Peut-on manger de la viande sacrifiée aux idoles ?

Quant à la viande sacrifiée, Paul en parle en 1 Corinthiens 10, où il répond à trois questions des Corinthiens :

  1. Peut-on s’asseoir dans un temple païen et manger de la viande sacrifiée, sachant dans son cœur que l’idole n’est rien et se disant qu’on ne l’adore pas ?
  2. Peut-on acheter au marché de la viande qui a été sacrifiée à un dieu païen ?
  3. Peut-on manger chez un païen, ne sachant pas si la viande qu’il sert a été offerte en sacrifice ?

Pour la première question, Paul explique aux versets 14-22 que participer à un festin en honneur d’une idole, quelle que soit son intention personnelle, est un acte d’adoration qui met la personne en communion avec l’idole. Ce serait manger à la table des démons et provoquer la jalousie du Seigneur. La réponse est non.

Pour la deuxième question, Paul répond aux versets 25 et 26 que l’on pouvait manger de tout ce qui se vendait au marché, mais que l’on ne devait pas poser des questions pour savoir si la viande avait été sacrifiée. En ajoutant : « car la terre est au Seigneur, et tout ce qu’elle renferme », il veut dire que la viande n’appartenait pas réellement à l’idole, même si elle lui avait été consacrée. Dieu est le propriétaire de toutes choses, et les actions des hommes ne peuvent rien changer à cette vérité. La viande n’était pas souillée en elle-même.

Pour la troisième question, Paul dit aux versets 27 et 28 que nous pouvons manger ce qu’on nous sert chez un païen, mais que si quelqu’un nous informe que la viande a été sacrifiée, nous ne devons pas en manger.

La conclusion est que le chrétien doit s’abstenir totalement de tout ce qui est identifié comme étant sacrifié à une idole, mais manger d’un sacrifice sans le savoir ne souille pas.

Pour revenir en Romains 14, nous voyons qu’il n’était pas interdit de manger de la viande en général, bien que certains chrétiens ne comprenaient pas encore cette vérité. Par contre, rappelons-nous que Dieu n’a pas ordonné aux hommes de manger certains aliments. C’est un droit mais pas une obligation.

Compte tenu de cette divergence d’idées, qu’est-ce que Dieu nous recommande ?

« Que celui qui mange ne méprise point celui qui ne mange pas, et que celui qui ne mange pas ne juge point celui qui mange, car Dieu l’a accueilli. » (verset 3)

Il faut éviter ces attitudes très communes quand on n’est pas du même avis qu’un autre.

Paul continue :

« Qui es-tu, toi qui juges un serviteur d’autrui ? S’il se tient debout ou s’il tombe, cela regarde son maître. Mais il se tiendra debout, car le Seigneur a le pouvoir de l’affermir. » (verset 4)

Ici Paul reproche le chrétien qui juge son frère, en lui rappelant que c’est la place du Seigneur que de juger ses serviteurs. Selon le contexte, il s’agit, bien sûr, de celui qui condamne un autre serviteur pour avoir violé ce qui n’est pas un commandement du maître. Là où le maître n’a pas donné de règle pour gouverner son serviteur, personne d’autre n’a le droit d’en donner. Aucun chrétien n’a le droit de juger un autre, sauf où le Christ l’autorise et nous donne la règle à appliquer. Il y a des situations où nous avons un devoir de juger (1 Cor. 5.1-5,9-13; 6.1-7; Matthieu 7.15-20), mais il faut toujours aborder de telles situations avec beaucoup d’humilité, de compassion et d’amour. Là où le jugement ne s’impose pas, l’accent doit être mis sur la patience, la tolérance et le respect mutuel.

Faut-il observer des « jours saints » ?

Au verset 5 nous voyons un autre exemple du genre de principes personnels au sujet desquels on ne devait pas se juger les uns les autres : les distinctions entre les jours. Paul ne parle pas ici des jours de réunions de l’Église, comme le dimanche. Ces réunions devaient être respectées (Hébreux 10.25), et à l’égard de ces réunions, le premier jour de la semaine avait une importance particulière (Actes 20.7; 1 Corinthiens 16.1,2) et un nom spécial (Apocalypse 1.10 – comment Jean pouvait-il désigner un jour en particulier comme « le jour du Seigneur » s’il n’y avait absolument pas de distinction entre les jours ?). Paul ne parle pas non plus des soi-disant « fêtes chrétiennes » telles que Pâques, Noël, Ascension, Toussaint, etc. Premièrement, ces fêtes étaient inconnues au premier siècle, et deuxièmement, leur observance engage généralement des Églises entières. Or Paul parle ici de décisions personnelles qui n’engageaient pas les autres membres de l’Église à faire quoi que ce soit. (Si un chrétien choisit de marquer spécialement à son propre niveau un jour pour se rappeler la naissance de Jésus ou son ascension, les autres ne devraient pas, selon ce passage, le juger. Mais instituer une telle observance au niveau de toute l’Église enlève la question des jours du cadre de Romains 14.)

Ce qui est plus probable est que Paul parle du chrétien d’origine juive qui a toujours observé les jours saints indiqués dans la loi de Moïse : les fêtes, les nouvelles lunes et les sabbats (Col. 2.16). Étant devenue chrétienne, cette personne pourrait avoir du mal à accepter qu’elle n’avait plus besoin de respecter ces jours.

Dans les versets qui suivent, Paul nous dit, en effet, de croire à la sincérité de nos frères, même quand nous ne partageons pas leur point de vue sur de telles questions. Chacun cherche à plaire au Seigneur. Celui qui mange de tout n’est pas en train de vivre pour son propre plaisir parce qu’il mange. Il reconnaît le Seigneur comme la source de ce qu’il reçoit. Celui qui s’abstient de viande rend grâces aussi, étant donné qu’il s’en abstient de bon cœur afin de plaire au Christ. Les deux camps reconnaissent la souveraineté du Seigneur en toutes choses.

À partir du verset 13, Paul introduit la deuxième idée principale :

Il ne faut pas pousser votre frère à pécher en violant sa conscience

Ne faites rien qui puisse le faire tomber. Dans la question d’aliments, il est clair que celui qui croit pouvoir manger de tout a raison. Le Seigneur a déclaré purs tous les aliments. « … Rien de ce qui du dehors entre dans l’homme ne peut le souiller, car cela n’entre pas dans son cœur, mais dans son ventre » (Marc 7.18,19). « Tout ce que Dieu a créé est bon, et rien ne doit être rejeté, pourvu qu’on le prenne avec actions de grâces, parce que tout est sanctifié par la parole de Dieu et par la prière » (1 Timothée 4.4,5). Puisqu’il en est ainsi, un aliment n’est plus impur que dans le cas où quelqu’un le considère comme impur.

On peut, cependant, avoir raison sur un point mais ne pas agir avec amour. Dans ce cas, on est condamnable, malgré le fait qu’on a raison en ce qu’on croit. Si je reconnais que l’aliment est pur, il ne peut pas me souiller, mais ce n’est pas pour cela que je peux en manger. Il faut considérer l’effet de mon action sur les autres. Si je mange devant mon frère qui considère l’aliment comme souillé, il sera peiné en me voyant faire ce qu’il considère un péché. Mais ce qui est encore plus grave, c’est qu’il risque de se conformer à mon exemple, malgré ses doutes privés, et en mangeant violer sa conscience. Je dois attacher plus d’importance à mon frère qu’à la nourriture. Mon droit de manger de la viande n’est pas plus important que le salut d’un homme.

À partir du verset 16, le sujet passe du singulier au pluriel. C’est la réputation de toute l’Église qui est en vue maintenant. C’est bien d’avoir la liberté de manger (ou de ne pas manger), mais ce n’est pas là l’essentiel du royaume. Ce qui est vraiment important, c’est la justice, la paix et la joie. Se juger et se mépriser les uns les autres et user de ses « droits » quels que soient les effets sur les autres attirera des calomnies contre la liberté chrétienne.

Quelques applications

Ayant expliqué le chapitre dans son contexte d’origine, comment peut-on l’appliquer de nos jours ? Rappelons-nous que ce chapitre parle des attitudes qui doivent prévaloir parmi les chrétiens quand il y a des différences parmi eux concernant ce qui ne fait pas l’objet d’un commandement du Seigneur. Ces principes ne concernent pas des violations de la volonté de Dieu. Il est important de se rappeler aussi qu’il s’agit des actions des chrétiens en tant qu’individus et non pas des actions de l’Église collectivement.

Paul a déjà appliqué ces principes à la question des aliments, des jours saints et du vin (v. 21). En ce qui concerne le fait de boire du vin (sans s’enivrer, bien sûr, puisque l’ivresse est clairement condamnée comme un péché), il y a le danger d’entraîner une autre personne dans le péché, soit parce qu’elle violerait sa conscience soit parce qu’elle risquerait de ne pas rester sobre.

Une autre application pourrait être dans le domaine de l’habillement. Une femme ne devrait pas s’habiller de façon séduisante (habits qui serrent trop, jupes trop courtes, excès de maquillage, etc.) tout en se disant : « Si les hommes ont des convoitises à mon égard, c’est leur problème ; ils ne devraient pas penser ainsi. J’ai le droit de me vêtir comme je le veux. » Au contraire, « Il est bien […] de s’abstenir de ce qui peut être pour ton frère une occasion de chute, de scandale ou de faiblesse. » (La modestie est, bien sûr un principe que les hommes aussi doivent observer.)

Certains chrétiens jugent les autres au sujet de leurs méthodes d’évangélisation. Il est vrai que certaines méthodes sont plus efficaces que d’autres, mais le Seigneur n’a pas ordonné une seule méthode. Quelle que soit sa méthode, c’est pour le Seigneur qu’on travaille. On ne doit pas nous juger.

D’autres jugent leurs frères sur le fait de regarder la télévision, de jouer aux sports, ou d’écouter de la musique non religieuse. D’un côté, ne critiquons pas si facilement, mais reconnaissons la différence entre nos principes personnels et les commandements du Seigneur ; de l’autre côté, soyons sensibles à l’influence de nos actions sur les autres, et abstenons-nous de ce qui peut nuire à notre frère ou à l’Église.

Conclusion

La division dans une assemblée ne commence pas toujours par la fausse doctrine. Elle commence souvent par le fait de mépriser ceux qui ne partagent pas nos opinions. Elle s’aggrave quand nous tenons à exercer nos « droits » sans considérer l’effet de nos actions sur nos frères. Apprenons à distinguer entre les enseignements bibliques et nos opinions ou principes personnels. Et efforçons-nous toujours « de conserver l’unité de l’esprit par le lien de la paix » (Éphésiens 4.3).

B. B.
(Dans Vol. 4, No. 3)