La patience et l’impatience de Job

La souffrance vient tôt ou tard dans la vie de presque chaque personne : la maladie ou l’infection qui produit la douleur physique, la perte d’un bien-aimé ou la solitude écrasante, la déception de se voir une fois de plus privé de ce qu’on a tant désiré, que ce soit un enfant, un emploi, la guérison, ou l’approbation. Certaines souffrances sont intenses mais de courte durée ; d’autres sont moins aiguës mais plus persistantes – soit elles sont là continuellement, soit elles ne cessent jamais de revenir pour nous tourmenter quand nous pensions en être délivrés.

Quand il est question de supporter avec patience la souffrance ou l’épreuve, on pense souvent à l’exemple de Job. L’Épître de Jacques le cite comme modèle : « Voici, nous disons bienheureux ceux qui ont souffert patiemment. Vous avez entendu parler de la patience de Job » (Jacques 5.11). Mais Job a quand même lutté avec le problème de la souffrance. Quelles leçons en a-t-il tirées ?

Permettons à la Bible (principalement la Bible en français courant) de nous raconter son histoire à partir de Job 1.1 :

« Il y avait au pays d’Uts un homme du nom de Job. Cet homme était irréprochable, droit, fidèle à Dieu et se tenait à l’écart du mal. Il était père de sept fils et de trois filles ; il possédait sept mille moutons, trois mille chameaux, cinq cents paires de bœufs et cinq cents ânesses, ainsi que de nombreux domestiques. C’était le personnage le plus considérable à l’est de la Palestine. »

Satan lance le défi

« Or un jour le Satan, l’accusateur, se présenta [devant Dieu]. Le Seigneur lui demanda : « D’où viens-tu donc ? »

L’accusateur répondit au Seigneur : « Je viens de faire un petit tour sur terre.

— Tu as sûrement remarqué mon serviteur Job, dit le Seigneur. Il n’a pas son pareil sur la terre. C’est un homme irréprochable et droit ; il m’est fidèle et se tient à l’écart du mal.

— Si Job t’est fidèle, répliqua l’accusateur, est-ce d’une manière désintéressée ? N’est-il pas évident que tu le protèges de tous côtés, comme par une clôture, lui, sa famille et ses biens ? Tu as si bien favorisé ce qu’il a entrepris, que ses troupeaux sont répandus sur tout le pays. Mais ose toucher à ce qu’il possède, et je parie qu’il te maudira ouvertement ! » »

Pour beaucoup de personnes, l’accusation de Satan serait exacte : c’est bien par intérêt qu’ils servent Dieu. Après tout, dans beaucoup de religions traditionnelles en Afrique et ailleurs dans le monde, on abandonne ses dieux, ses fétiches ou ses idoles, quand on n’obtient pas ce que l’on désire, et on opte pour d’autres dieux qui, eux, permettront réellement d’obtenir les bonnes récoltes, la guérison, et la protection du malheur. La fidélité dans ces cas dépend de la satisfaction des attentes de l’adorateur.

Quand, par contre, on agit d’une manière désintéressée, on fait ce qu’on fait parce qu’il est juste de faire ainsi. Il est du devoir des enfants de s’occuper de leurs parents âgés, mais il y a des enfants handicapés mentalement ou physiquement qui ne pourront jamais remplir cette fonction. Certains parents de personnes handicapées, voyant qu’ils ne pourront pas recevoir grand-chose de leurs enfants, les négligent. Cela est condamnable. D’autres, par contre, s’occupent de ces pauvres enfants avec amour et dévouement, sachant parfaitement qu’ils seront à leur charge toute leur vie et ne pourront jamais leur donner en retour. Ils s’en occupent, non par intérêt, mais parce que l’amour le demande. De même, certains enfants adultes négligent ou traitent abusivement leurs parents, surtout quand ces derniers n’ont rien à leur donner. Ils devraient les traiter avec honneur simplement parce qu’il est juste de respecter ses parents.

Dieu est, bien sûr, notre Créateur. Il est de plein droit le Souverain de l’univers. Nous devrions lui obéir et le respecter profondément parce qu’il est juste de le faire, parce qu’il en est digne, et parce que nous sommes ses créatures. Beaucoup tombent dans l’erreur d’adorer Dieu tout simplement pour recevoir ce qu’ils désirent.

L’épreuve commence

« Le Seigneur dit à l’accusateur : « Eh bien, tu peux disposer de tout ce qu’il possède. Mais garde-toi de toucher à lui-même. »

Alors l’accusateur se retira hors de la présence du Seigneur.

Un jour […] un messager arriva chez Job pour lui annoncer : « Les bœufs étaient en train de labourer, et les ânesses se trouvaient au pré non loin de là, quand des Sabéens se sont précipités sur eux et les ont enlevés, passant tes serviteurs au fils de l’épée. J’ai été le seul à pouvoir m’échapper pour t’en avertir. » »

D’autres messagers suivent le premier pour annoncer à Job qu’il a perdu d’un seul coup le reste de ses biens : ses moutons, ses chameaux et les serviteurs qui s’en occupaient.

« Puis un autre arriva pour annoncer : « Tes enfants étaient occupés à manger et boire chez leur frère aîné, quand un ouragan survenant du désert a heurté violemment les quatre coins de la maison ; les jeunes gens sont morts sous les décombres. »

Alors Job se leva, il déchira son manteau, se rasa la tête et se jeta à terre, le front dans la poussière ; il déclara : « J’étais nu quand je suis venu au monde, c’est nu aussi que je le quitterai. Le Seigneur a donné, le Seigneur a repris. Je n’ai qu’à remercier le Seigneur. »

Dans tous ces malheurs Job n’attribua rien d’injuste à Dieu. »

Voici la réaction qui fit la réputation de Job. Job reconnut que Dieu était, en fin de compte, le maître du monde et celui qui détermine les circonstances de vie de chaque être humain. Il n’accuse ni le hasard aveugle, ni les hommes (les Sabéens), ni l’injustice de Dieu. Il accepte simplement ce que Dieu a décidé.

L’épreuve se poursuit

Dans le second chapitre du livre, Satan se présente de nouveau devant Dieu, qui lui fait remarquer au sujet de Job :

« « Il m’est fidèle et se tient à l’écart du mal. Il est resté irréprochable. C’est donc pour rien que tu m’as poussé à lui faire du tort. » Mais l’accusateur répliqua : « […] Tout ce qu’un homme possède il le donnera pour sauver sa peau. Mais ose toucher à sa personne et je parie qu’il te maudira ouvertement. » Le Seigneur dit à l’accusateur : « Eh bien, tu peux disposer de lui, mais non pas de sa vie. »

Alors l’accusateur se retira hors de la présence du Seigneur. Il frappa Job d’une méchante maladie de peau, depuis la plante des pieds jusqu’au sommet du crâne. Job s’assit au milieu du tas des cendres et ramassa un débris de poterie pour se gratter.

Sa femme lui dit : « Maudis Dieu, et meurs !

— Tu parles comme une femme privée de bons sens, lui répondit Job. Si nous acceptons de Dieu le bonheur, pourquoi refuserions-nous de lui le malheur ? »

Dans cette nouvelle épreuve Job ne pécha point par ses lèvres. »

Pour Job, il ne serait pas normal de se soumettre à Dieu uniquement quand il nous accorde les bonnes choses que voulons dans la vie (cf. Habacuc 3.17,18). Ce n’est pas que nous avons droit à ces choses. Nous sommes de simples créatures et ne pouvons pas exiger quoi que ce soit du Créateur. Même si nous avions eu le droit d’attendre de bonnes choses de la part de Dieu, nous aurions perdu ce droit par notre péché et notre rébellion. Et tous ont péché (Rom. 3.23). En réalité, toutes les choses agréables que Dieu nous accorde sont tout simplement des grâces que nous n’avons pas méritées.

Job réussit donc à l’épreuve. Au moins pour un temps. Mais son attitude finit par changer.

« Trois amis de Job apprirent les malheurs qui lui étaient arrivés. C’étaient Éliphaz de Théman, Bildad de Schuach, et Tsophar de Naama. Ils vinrent de chez eux et se mirent d’accord pour lui manifester leur sympathie et le réconforter. En le regardant de loin, ils le trouvèrent méconnaissable. Alors ils ne purent retenir leurs larmes ; ils déchirèrent leurs manteaux et jetèrent en l’air de la poussière pour s’en couvrir la tête. Puis ils restèrent assis à terre avec Job pendant sept jours et sept nuits, sans rien lui dire, tant sa souffrance leur paraissait grande. »

Cette manifestation de solidarité avec leur ami souffrant était exemplaire. En effet, nous n’avons souvent pas de paroles pour consoler les affligés, mais notre présence à leurs côtés en dit long sur notre amour. Les trois amis de Job auraient mieux fait de garder ce silence réconfortant, parce que les paroles qu’ils ont prononcées par la suite n’ont fait qu’augmenter la souffrance de Job.

« Ta souffrance prouve que tu es coupable »

Éliphaz, Bildad et Tsophar avancent plusieurs idées sur la souffrance, mais ils sont d’accord que Job souffre parce que Dieu punit ses péchés. Voilà l’idée principale dans tous leurs discours. Si Job était réellement innocent, il ne serait pas si misérable.

Voici un petit échantillon de leurs paroles :

Éliphaz : « Cherche dans ton souvenir : quel est l’innocent qui a péri ? Quels sont les justes qui ont été exterminés ? Pour moi, je l’ai vu, ceux qui labourent l’iniquité et qui sèment l’injustice en moissonnent les fruits » (4.7,8). Sous-entendu : en voyant ce que tu es en train de récolter, nous savons ce que tu as dû semer.

Bildad : « Dieu renverserait-il le droit ? Si tes fils ont péché contre lui, il les a livrés à leur péché […] Ainsi arrive-t-il à tous ceux qui oublient Dieu » (8.3,4,13).

Tsophar : « Oh ! si Dieu voulait parler, […] tu verrais alors qu’il ne te traite pas selon ton iniquité » (11.5,6). En d’autres termes, Job, tu mérites encore pire que le châtiment que tu reçois de Dieu.

Évidemment, au lieu de consoler Job, leurs fausses accusations le blessèrent davantage. Job savait au fond de lui-même qu’il ne s’était pas rebellé contre Dieu. Il n’avait pas été injuste envers ses semblables. Il avait toujours eu de la compassion pour les malheureux. Il avait été intègre et droit. Il ne peut pas admettre que ces amis aient raison. Et pourtant, il ne trouve pas d’autre explication pour ce qui lui arrive. Sauf celle-ci :

« Dieu me traite injustement ! »

Oui, sous les attaques de ses trois amis, Job, cet homme patient et pieux, perdit sa patience proverbiale et devint violent dans ses propos à l’égard de Dieu :

« Lui qui m’assaille comme par une tempête,
Qui multiplie
sans raison mes blessures,
Qui ne me laisse pas respirer,
Qui me rassasie d’amertume
[…]
Suis-je innocent, il me déclarera coupable.
Innocent ! Je le suis ; mais je ne tiens pas à la vie,
Je méprise mon existence.
Qu’importe après tout ? Car, j’ose le dire,
Il détruit l’innocent comme le coupable […]
Mais
il se rit des épreuves de l’innocent. » (9.17-23)

Job accepte le même principe que ses amis : Dieu règne sur le monde, et en tant que Juge divin, il est censé punir la méchanceté et récompenser la justice. Job, tout comme ses amis, ignore l’idée d’une résurrection d’entre les morts, d’un jugement dernier, du paradis et de l’enfer. (Ce n’est que dans le Nouveau Testament que ces vérités sont clairement révélées. Deux Timothée 1.10 nous dit que Dieu « a mis en évidence la vie et l’immortalité par l’Évangile ».) Pour Job et ses amis, la justice de Dieu doit donc s’administrer du vivant de chaque personne. Voilà pourquoi la souffrance d’un homme intègre comme Job présente un si grand dilemme. Voilà pourquoi Job tire la conclusion que Dieu n’est pas juste.

Un jeune sage prend la parole

Éliphaz, Bildad et Tsophar sont tous des hommes âgés, mais un quatrième, plus jeune, les écoute et se fâche finalement de leur façon de parler à Job. Il est, en plus, choqué par les propos de Job qui dit, en effet, qu’il ne sert à rien de servir Dieu. Le jeune homme Élihu entreprend donc de défendre l’honneur de Dieu.

Il rappelle que Dieu est souverain, et qu’il n’a pas de comptes à rendre, ni à Job ni à aucun homme (33.12,13). Il fait remarquer que Dieu n’a aucun motif pour être injuste, puisqu’il n’est endetté envers personne et que l’homme n’a aucun moyen de l’intimider ou d’acheter sa faveur (34.13,19). Il suggère que si les justes deviennent victimes de l’injustice ou de l’adversité, Dieu s’en sert, pas toujours pour les punir, mais pour les avertir et les amener à s’examiner et à éviter l’orgueil (36.8-10; voir aussi 2 Cor. 12.7 où l’apôtre Paul parle d’une « écharde dans la chair » qui lui fut donnée pour l’empêcher de s’enorgueillir). Élihu recommande l’humilité à celui qui est affligé. Même quand celui qui souffre n’a pas été parmi les plus méchants, quand il est conscient d’avoir essayé de faire ce qui est juste, il devrait se dire qu’il est bien possible qu’il ait pu pécher. Il a peut-être trop aimé le monde ; sans qu’il ne s’en rende compte, il s’est peut-être trop attaché à ses biens ou à ses amis ; peut-être qu’il mettait sa confiance en ce qu’il possédait plutôt qu’en Dieu qui donne tout. Dans de tels cas, il convient à l’homme de reconnaître que Dieu a le droit de châtier, de corriger, ou d’avertir, selon le besoin ; il convient de demander à Dieu de nous apprendre ce que nous ignorons (34.31,32). Enfin, Élihu ne dit pas, comme les autres, que Job souffre parce qu’il a péché ; il lui dit plutôt : « Attention, Job. Tu pèches parce que tu souffres. C’est-à-dire dans ton affliction tu dis des choses à l’égard de Dieu et manifestes des attitudes qui ne sont pas justes. » « Garde-toi de te livrer au mal, car la souffrance t’y dispose » (36.21).

Le Tout-Puissant intervient

Finalement, vers la fin du livre, Dieu lui-même prend la parole et demande à Job : « Qui es-tu pour oser rendre mes plans obscurs à force de parler de ce que tu ignores ? Tiens-toi prêt, sois un homme : je vais t’interroger, et tu me répondras » (38.2,3). Il poursuit avec une série de questions, au moyen desquelles le Seigneur dit essentiellement à Job :

Je suis Dieu, et tu ne l’es pas. Tu n’as pas l’intelligence et le pouvoir que j’ai. Tu n’as pas créé l’univers et tu ne soutiens pas tout ce qui vit, comme je le fais. Tu n’es pas capable de maîtriser certaines de mes créatures ; à plus forte raison tu ne pourrais pas gérer le monde. C’est moi qui vois tout ce qui est caché. Tu n’es donc pas en mesure de comprendre ce que j’ai à faire, de me conseiller ou de me juger.

Job, le fait que tu souffres ne te donne pas le droit de me blâmer, et ne te dispense pas du devoir de t’approcher de moi dans l’humilité et la soumission. Je n’ai aucun besoin de me justifier devant un être humain, et je ne te donnerai pas d’explications simplement parce que tu en as réclamées.

« Alors Job répondit au Seigneur : « Je ne suis rien du tout. Que puis-je te répondre ? […] J’ai parlé d’un sujet trop ardu, je n’y comprenais rien et ne le savais pas ! […] Je reconnais avoir eu tort et m’humilie en m’asseyant dans la poussière et dans la cendre. » » (42.1-3,6)

Il faut reconnaître que malgré le reproche que Dieu a fait à Job pour ses propos trop hardis, Dieu savait que son serviteur avait quand même gardé son intégrité, et il lui a montré sa faveur. La douleur extrême, aggravée par les fausses accusations de ses amis, avait poussé Job à mal parler. Dieu lui pardonna ses propos, lui rendit la santé et la richesse, et lui donna d’autres enfants.

Ensuite Dieu reprit sévèrement les amis de Job qui avaient proclamé des faussetés à son égard. En effet, en affirmant à tort que Dieu récompense toujours et dans cette vie toutes les actions des hommes, on permet aux méchants qui jouissent de bonne santé et de prospérité de se justifier dans le mal, croyant que leurs circonstances agréables prouvent qu’ils ont l’approbation de Dieu. On révolte, par contre, la personne qui, comme Job, a essayé d’être fidèle à Dieu, mais qui se trouve dans l’affliction. Et on pousse d’autres personnes, celles qui observent les injustices dans le monde, à douter de l’existence même de Dieu, puisqu’on leur a fait croire que Dieu (s’il existait) ne permettrait jamais aux gens cruels de prospérer et aux innocents de souffrir.

Ni Job ni ses amis n’ont été mis au courant du défi de Satan et de l’épreuve dont Job faisait l’objet. Dieu n’a pas choisi de leur révéler tout cela, mais leur demandait plutôt de lui faire confiance. Nous aussi, nous ignorons souvent les raisons pour certains malheurs qui nous frappent. Nous devons nous rappeler que notre souffrance ne nous donne pas le droit d’accuser Dieu de mal faire. Mais en tant que chrétiens, nous avons des avantages par rapport à Job quand il nous faut vivre avec la souffrance.

La consolation en Jésus-Christ

Nous savons que Dieu a fixé un jour où il jugera les vivants et les morts (Actes 10.42; 17.31; 2 Thess. 1.6-10). Un jour la vraie justice sera administrée.

Nous savons que, quelle que soit la misère que nous supportions dans cette vie, nous pouvons dire avec l’apôtre Paul : « J’estime que les souffrances du temps présent ne sauraient être comparées à la gloire à venir » (Romains 8.18). La gloire éternelle attend le serviteur fidèle de Dieu, et cela change tout.

« Nous ne perdons pas courage […] parce que nous regardons, non point aux choses visibles, mais à celles qui sont invisibles ; car les choses visibles sont passagères, et les invisibles sont éternelles. » (2 Cor. 4.16,18)

L’affliction n’est jamais agréable, certes, mais « toutes choses concourent au bien de ceux qui aiment Dieu », même les souffrances (Rom. 8.28). Voir aussi Jacques 1.2-4; Héb. 12.10,11; Rom. 5.3,4.

Job croyait que Dieu s’était mis à le haïr. Nous avons l’assurance que, quoi qu’il arrive, Dieu nous aime. Il l’a prouvé une fois pour toutes. « Dieu prouve son amour envers nous, en ce que, lorsque nous étions encore des pécheurs, Christ est mort pour nous » (Rom. 5.8). Même quand nous ne comprenons pas ce qui nous arrive, nous ne doutons pas de l’amour de Dieu pour nous.

Jésus lui-même a souffert pour nous. Il comprend ce qu’est la douleur intense, sur le plan physique comme sur le plan émotionnel. Il ne reste pas détaché de nos souffrances et des injustices que nous subissons – il compatit (Héb. 2.14-18; 4.14-16). Il était parfaitement innocent, mais il a souffert plus que nous tous. Prenons-le donc comme modèle :

« Considérez, en effet, celui qui a supporté contre sa personne une telle opposition de la part des pécheurs, afin que vous ne vous lassiez point, l’âme découragée. » (Hébreux 12.3)

B. B.
(Dans Vol. 12, No. 3)

Le chrétien et la souffrance

Beaucoup de prédicateurs prêchent un évangile de succès, de prospérité et de bonne santé. Ils disent que Jésus a donné la victoire sur la maladie et l’échec. Il suffit d’avoir suffisamment de foi en lui, et vous aurez la solution à tous les problèmes dans votre vie.

Certainement le chrétien peut et doit confier tous ses problèmes au Seigneur. La Bible nous exhorte en 1 Pierre 5.7 : « Déchargez-vous sur lui de tous vos soucis, car lui-même prend soin de vous. » Et Paul nous dit en Philippiens 4.6,7 : « Ne vous inquiétez de rien ; mais en toute chose faites connaître vos besoins à Dieu par des prières et des supplications, avec des actions de grâce. Et la paix de Dieu, qui surpasse toute intelligence, gardera vos cœurs et vos pensées en Jésus-Christ. » Nous savons que Dieu est capable de guérir toute maladie, de résoudre tout problème, que ce soit matériel ou spirituel.

Mais, est-ce que la Parole de Dieu promet réellement que le chrétien verra se résoudre tous ses problèmes dans cette vie ? Est-ce que l’expérience des premiers chrétiens nous montre que la souffrance n’existe plus pour celui qui se donne à Dieu ? Est-ce que le message « Arrêtez de souffrir », imprimé sur des banderoles au-dessus de certains lieux de culte, est le message que le Seigneur nous a demandé de prêcher au monde ?

Les chrétiens fidèles souffrent dans cette vie.

Plusieurs exemples bibliques nous montrent que les chrétiens, tout comme le reste des hommes, tombent parfois malades. Paul dit, par exemple : « J’ai laissé Trophime malade à Milet » (2 Timothée 4.20). Épaphrodite, un autre compagnon de voyage de l’apôtre Paul, est tombé également malade. Il était près de la mort, « mais Dieu a eu pitié de lui » (Philippiens 2.25-27). Paul avait une maladie que Dieu n’a pas guérie, malgré plusieurs prières. Il fut obligé de continuer de vivre avec ce qu’il appelait son « écharde dans la chair » (2 Corinthiens 12.7). Les chrétiens comme les autres hommes subissent les effets de la vieillesse. Ils deviennent plus faibles avec l’âge, ils éprouvent les mêmes douleurs physiques que les autres. En plus des maladies, nous savons que les chrétiens ne sont pas tous épargnés quand il y a des guerres et des catastrophes naturelles telles que les tremblements de terre, les feux de brousse et les inondations.

Non seulement cela, mais le chrétien peut subir certaines souffrances, non pas malgré sa relation avec Dieu, mais plutôt parce qu’il est enfant de Dieu : il s’agit de la persécution. Jésus avait prévenu ses disciples : « Alors on vous livrera aux tourments, et l’on vous fera mourir ; et vous serez haïs de toutes les nations, à cause de mon nom » (Matthieu 24.9). L’apôtre Paul énumère en 1 Corinthiens 4.11-13 quelques-unes des souffrances que lui et les autres apôtres subissaient pour le Seigneur :

« Jusqu’à cette heure nous souffrons la faim, la soif, la nudité ; nous sommes maltraités, errants çà et là ; nous nous fatiguons à travailler de nos propres mains ; injuriés, nous bénissons ; persécutés, nous supportons ; calomniés, nous parlons avec bonté ; nous sommes devenus comme les balayures du monde, le rebut de tous, jusqu’à maintenant. »

Évidemment Paul n’aurait pas été trop convaincant en prêchant un évangile de succès, de prospérité et de confort sur la terre. Il souffrait trop lui-même. Et pourtant on ne trouverait pas un chrétien plus fidèle que lui.

Oui, les chrétiens peuvent aussi souffrir dans cette vie, parfois plus que les non-chrétiens.

Les souffrances ont une valeur pour le chrétien.

Mais pourquoi Dieu permettrait-il à ses enfants de souffrir dans cette vie ? Les païens ne diraient-ils pas que notre Dieu n’est pas puissant ? N’est-ce pas une honte pour Dieu quand ceux qui le servent sont dans la misère ? À quoi cela peut-il servir ?

La Bible nous assure que la souffrance peut avoir une valeur réelle dans la vie du chrétien. Paul, qui, comme nous l’avons vu, a tant souffert lui-même, a écrit ceci : « Nous savons du reste, que toutes choses concourent au bien de ceux qui aiment Dieu, de ceux qui sont appelés selon son dessein » (Romains 8.28). Toutes choses, même la souffrance, peuvent être utilisées par Dieu pour produire du bien.

Quel bien, par exemple ?

Souvent les difficultés nous permettent de grandir spirituellement, de développer du bon caractère. Nous reconnaissons ce principe en ce qui concerne l’homme physique et intellectuel. Peut-on supposer, par exemple, qu’un sportif deviendra un athlète sans entraînement, sans sacrifices, sans abstinences pénibles, sans effort ?

1. C’est ce principe que la Bible applique à la vie spirituelle dans l’Épître de Jacques 1.2-4 :

« Mes frères, regardez comme un sujet de joie complète les diverses épreuves auxquelles vous pouvez être exposés, sachant que l’épreuve de votre foi produit la patience. Mais il faut que la patience accomplisse parfaitement son œuvre, afin que vous soyez accomplis, sans faillir en rien. »

Les épreuves peuvent donc cultiver en nous la patience ou la persévérance.

2. Elles peuvent aussi nous apprendre à compatir aux souffrances des autres. Parce que nous aussi, nous connaissons la douleur d’avoir perdu un enfant, nous sommes plus sensibles en voyant un autre parent en deuil. Parce que nous avons connu l’échec, nous pouvons consoler notre frère dans son découragement. Parce que nous vivons avec une maladie chronique, nous savons aider le voisin quand il est malade. En 2 Corinthiens 1.3,4 Paul dit :

« [Dieu] nous réconforte dans toutes nos souffrances, afin que nous puissions réconforter ceux qui passent par toutes sortes de souffrances, en leur apportant le réconfort que nous avons nous-mêmes reçu de lui. »

3. En plus de la patience et la compassion, les épreuves nous apprennent souvent l’humilité et la prière.

Il est vrai que nous devrions prier en tout moment. Quand tout va bien, nous devrions prier pour remercier Dieu, et aussi prier pour les autres. Mais parfois, surtout quand tout va bien, nous négligeons de prier. Nous pensons suffire en nous-mêmes. Quand ça ne va pas, nous voyons notre propre faiblesse, notre besoin de l’aide et de la force de Dieu.

Dieu s’était beaucoup servi de l’apôtre Paul. Il lui avait donné beaucoup de révélations. En effet, une grande partie du Nouveau Testament a été écrite par Paul. Une telle distinction aurait pu rendre un homme orgueilleux. Paul dit en 2 Corinthiens 12.7-9 :

« Et pour que je ne sois pas enflé d’orgueil, à cause de ces révélations, il m’a été mis une écharde dans la chair, un ange de Satan pour me souffleter et m’empêcher de m’enorgueillir. Trois fois j’ai prié le Seigneur de l’éloigner de moi, et il m’a dit : Ma grâce te suffit, car ma puissance s’accomplit dans la faiblesse. »

Dieu a béni matériellement son peuple Israël, mais il était conscient du danger dans l’abondance, et il a mis les Israélites en garde de cette manière :

« Lorsque tu mangeras et te rassasieras, lorsque tu bâtiras et habiteras de belles maisons, lorsque tu verras multiplier ton gros et ton menu bétail, s’augmenter ton argent et ton or, et s’accroître tout ce qui est à toi, prends garde que ton cœur ne s’enfle, et que tu n’oublies l’Éternel ton Dieu… Garde-toi de dire en ton cœur : Ma force et la puissance de ma main m’ont acquis ces richesses. Souviens-toi de l’Éternel, ton Dieu, car c’est lui qui te donnera la force pour les acquérir. » (Deutéronome 8.12-14,17,18)

Que ce soit la maladie ou la pauvreté, les difficultés nous rappellent que tout ne dépend pas de nous, que Dieu seul est la source de vie et de tout ce qui est bien.

4. Les souffrances peuvent aussi nous empêcher de nous attacher trop à ce monde d’ici-bas. Il est vrai que le monde offre des plaisirs et des conforts. Mais les biens spirituels que Dieu veut nous donner sont d’une infiniment plus grande valeur. Ils sont éternels ; ils sont célestes. Quand nous n’avons pas de douleur, aucun sujet de tristesse, aucune difficulté, nous risquons de nous contenter de ce qui est moins bon, c’est-à-dire les conforts de cette vie terrestre. Les problèmes dans notre vie fixent nos regards sur la vie éternelle avec Dieu, là où « il essuiera toute larme de leurs yeux, et la mort ne sera plus, et il n’y aura plus ni deuil, ni cri, ni douleur, car les premières choses ont disparu » (Apocalypse 21.4). C’est pour cela que nous ressemblons à Abraham et les autres patriarches de la Bible, qui ont quitté leur patrie parce qu’« ils en désiraient une meilleure, c’est-à-dire une céleste. C’est pourquoi Dieu n’a pas honte d’être appelé leur Dieu, car il leur a préparé une cité » (Hébreux 11.16). Paul dit aux Philippiens que certaines personnes « ne pensent qu’aux choses de la terre. Mais notre cité à nous est dans les cieux, d’où nous attendons aussi comme Sauveur le Seigneur Jésus-Christ » (Philippiens 3.19,20). Si le chrétien est séduit par la vie de ce monde, il n’aura plus les yeux fixés sur son objectif céleste et ne l’atteindra plus. La souffrance rend la vie sur terre moins séduisante.

Nous voyons donc que la souffrance n’est pas mauvaise en elle-même. Comme le médicament qui a un très mauvais goût, mais qui soigne efficacement une maladie, la souffrance est certes désagréable, mais elle peut nous faire du bien. Comme dit l’auteur de l’Épître aux Hébreux en parlant du châtiment : « Il est vrai que tout châtiment semble d’abord un sujet de tristesse et non de joie ; mais il produit plus tard pour ceux qui ont été ainsi exercés un fruit paisible de justice » (Hébreux 12.11). Tout dépend de notre réaction. On dit que le même soleil qui fond la cire endurcit l’argile. La même épreuve peut rendre une personne rebelle et amère, et faire qu’une autre personne apprenne à mettre sa confiance en Dieu, à compatir aux souffrances des autres, à persévérer dans la foi et à s’attacher à son espérance d’aller au ciel.

La Bible parle de plusieurs autres valeurs de l’épreuve, mais il est évident que ce n’est pas par manque d’amour que Dieu nous permet parfois de souffrir. Il veut toujours ce qui est bien pour nous. Or, ce qui est bien est ce qui nous rapproche de Dieu ; ce qui est mal, c’est ce qui nous éloigne de Dieu. Ce qui est difficile et douloureux peut nous aider, et ce qui est facile et agréable peut nous perdre. Nous devons donc faire confiance à Dieu en toute circonstance.

La fin des souffrances pour le chrétien viendra s’il tient bon.

Les épreuves de celui qui ne connaît pas Jésus peuvent toujours améliorer son caractère, mais seul le chrétien a la promesse d’une fin définitive à toute souffrance. Cette assurance est exprimée par Paul, qui dit en Romains 8.18 : « J’estime que les souffrances du temps présent ne sauraient être comparées à la gloire à venir qui sera révélée pour nous. » Il dit aux Corinthiens :

« C’est pourquoi nous ne perdons pas courage. Et lors même que notre homme extérieur se détruit, notre homme intérieur se renouvelle de jour en jour. Car nos légères afflictions du moment présent produisent pour nous, au-delà de toute mesure, un poids éternel de gloire, parce que nous regardons, non point aux choses visibles, mais à celles qui sont invisibles ; car les choses visibles sont passagères, et les invisibles sont éternelles. » (2 Corinthiens 4.16-18)

Qu’est-ce que Dieu veut faire pour nous ? Il veut notre salut. Il veut enlever la séparation que le péché a dressée entre nous et lui, afin que nous soyons avec lui éternellement. Si Dieu permet au chrétien de connaître les afflictions, parfois très dures, ce n’est pas parce qu’il n’est pas tout-puissant ; ce n’est pas qu’il ne s’intéresse pas à nos problèmes. C’est parce que dans sa sagesse et son amour, il fait ce qui peut nous préparer pour une gloire éternelle.

B. B.
(Dans Vol. 6, No. 4)