Marie, la mère de Jésus

Je vous invite à examiner avec moi tous les principaux textes bibliques qui ont trait à Marie et au rôle qu’elle a joué dans l’histoire du salut.

Toutes les citations bibliques que nous employons dans cette étude sont tirées de la Bible de Jérusalem.

La première référence précise concernant la naissance du Christ se trouve dans la prophétie d’Ésaïe (7.14) : « C’est donc le Seigneur lui-même qui va vous donner un signe. Voici la jeune fille est enceinte et va enfanter un fils qu’on appellera Emmanuel. »

Cette prophétie, un ange du Seigneur la rappela implicitement à Joseph, quelque 700 ans plus tard, car le jour de sa réalisation était arrivé. Joseph songeait en effet à rompre avec sa fiancée Marie, car elle se trouvait enceinte « avant qu’ils n’eussent mené vie commune ». Mais l’ange lui dit :

« Joseph, fils de David, ne crains point de prendre chez toi Marie, ton épouse ; car ce qui a été engendré en elle vient de l’Esprit-Saint. Elle enfantera un fils, auquel tu donneras le nom de Jésus ; car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés. » (Matthieu 1.18-21)

L’annonciation faite à Marie

Nous savons que l’ange était déjà apparu à Marie. C’est d’ailleurs la très belle et très célèbre annonciation à Marie, rapportée dans l’Évangile de Luc :

« Il entra chez elle et lui dit : Salut, comblée de grâce, le Seigneur est avec toi. À ces mots elle fut bouleversée et elle se demandait ce que signifiait cette salutation. Mais l’ange lui dit : Rassure-toi Marie ; car tu as trouvé grâce auprès de Dieu. Voici que tu concevras et enfanteras un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus. Il sera grand et on l’appellera Fils du Très-Haut… »

Puis elle apprend que sa cousine Élisabeth est déjà prête à donner naissance à un fils, elle qu’on croyait stérile. Marie dit alors une phrase où transparaît toute son humilité et sa soumission : « Je suis la servante du Seigneur ; qu’il m’advienne selon sa Parole ! » (Luc 1.26-38).

Peu de temps après, le récit de Luc décrit la visite de Marie à sa parente Élisabeth, qui elle, doit bientôt donner naissance à Jean-Baptiste. En voyant Marie, Élisabeth s’exclame :

« Tu es bénie entre les femmes, et béni le fruit de ton sein ! Et comment m’est-il arrivé que la mère de mon Seigneur vienne à moi ? Car, vois-tu, dès l’instant où ta salutation a frappé mes oreilles, l’enfant a tressailli d’allégresse en mon sein. Oui, bienheureuse celle qui a cru en l’accomplissement de ce qui lui a été dit de la part du Seigneur ! »

À son tour, Marie glorifiera Dieu dans une grande exultation de son âme :

« Mon âme exalte le Seigneur, et mon esprit tressaille de joie en Dieu mon Sauveur, parce qu’il a jeté les yeux sur son humble servante. Oui désormais toutes les générations me diront bienheureuse, car le Tout-Puissant a fait pour moi de grandes choses… »

Et elle précise quelles sont ces grandes choses : la merveilleuse naissance qu’elle attend et qui constitue l’intervention personnelle de Dieu pour le salut de tout un peuple (Luc 1.39-55).

Jésus, Marie et Joseph

Lorsque ce jour arrive à Bethléem, Marie et Joseph reçoivent la visite de bergers qui leur racontent ce qui vient de leur arriver et tout ce que les anges leur ont appris. L’évangéliste Luc nous confie délicatement que Marie « conservait avec soin tous ces souvenirs et les méditait en son cœur » (Luc 2.15-20).

Lors de la présentation au temple, le vieux prophète Siméon dévoile à Marie : « L’accueil qui sera fait au Messie : Il est destiné à être une occasion de chute ou de relèvement en Israël ; on prendra parti pour ou contre lui ; il sera un signe contesté, admis par les uns rejeté par les autres. » Puis il dit à Marie : « et toi-même, un glaive te transpercera l’âme » (Luc 2.33-35).

En effet, de voir le fruit de sa chair ainsi méconnu et haï, son cœur en sera comme brisé.

Cependant ni Marie, ni Joseph, ne connaissaient la nature exacte de la mission de leur Fils. Il y avait bien eu l’annonce faite par l’ange du Seigneur, l’apparition extraordinaire aux bergers de Bethléem et la prophétie de Siméon, mais tout cela était encore vague. Ils devaient comprendre petit à petit, par étapes successives.

L’épisode de Jésus perdu à Jérusalem et retrouvé parmi les docteurs traduit le désarroi de Marie et de Joseph devant l’attitude de leur fils.

« Pourquoi me cherchiez-vous ? » leur dit-il. « Ne saviez-vous pas que je me dois aux affaires de mon Père ? Mais ils ne comprirent pas la parole qu’il venait de leur dire » (Luc 2.46-50).

Jésus vient ici d’affirmer sa conscience de la mission que son Père céleste lui a confiée. « Il revendique des devoirs particuliers à l’égard de son Père et pour les remplir une indépendance absolue envers les créatures » (note de la Bible de Jérusalem). Ce sentiment, Jésus l’exprimera encore à maintes reprises. Qu’on se souvienne des noces de Cana (Jean 2.1-12). Le vin venant à manquer, Marie en parle à Jésus et ce dernier lui répond : « Que me veux-tu femme ? Mon heure n’est pas encore venue ! » Littéralement, il dit : « Quoi à moi et à toi ? » Dans ses notes, la Bible de Jérusalem signale que cette expression est typiquement sémitique. On l’emploie pour repousser une intervention jugée inopportune ou même pour signifier à quelqu’un qu’on ne veut avoir aucun rapport avec lui.

L’image d’une mère

Jusqu’à présent, dans l’Évangile, nous avons de Marie l’image d’une femme effacée et soumise, même à travers l’émerveillement et l’exaltation des premiers temps. C’est aussi l’image typique d’une mère qui veille sur son enfant et qui « repasse dans son cœur » tout ce qui le concerne. Désormais, les Évangiles ne parleront plus guère de Marie. Après les noces de Cana, elle disparaît de la vie publique du Christ. Nous la retrouvons au pied de la croix. Là, nous la devinons, mère prostrée, cruellement déchirée par la douleur, car celui qui pend là, sur le bois, elle l’a porté dans son sein.

Voyant sa mère et près d’elle l’apôtre Jean, Jésus la lui confiera dans un dernier geste de sollicitude et de tendresse : « Femme, voici ton fils ; puis il dit au disciple : Voici ta mère ; et dès ce moment le disciple la prit chez lui » (Jean 19.25-27).

Nous voyons Marie pour la dernière fois, peu de temps après l’ascension du Christ. Elle est présente avec les apôtres, en compagnie d’autres femmes ainsi que des frères de Jésus. Ils sont tous assemblés pour prier (Actes 1.12-14). La Bible ne dit absolument pas qu’elle ait été présente lors de la descente du Saint-Esprit sur les apôtres.

Le culte à Marie

Nous avons annoncé au début de notre texte que nous allions examiner tous les principaux textes bibliques ayant trait à Marie. La chose étant faite, nous ne pouvons que nous étonner de leur nombre restreint. En fait, il n’y a que les deux premiers chapitres de l’Évangile selon Luc qui nous renseignent le mieux sur les circonstances de la naissance du Sauveur. Nous avons ensuite quelques versets consacrés aux noces de Cana, à Marie au pied de la croix et une brève mention de sa présence lors d’une réunion de prières avec les apôtres… c’est tout.

Encore une fois, on ne peut que s’étonner de la disproportion qui existe entre ces quelques versets qui font mention d’elle et le culte zélé qu’on lui voue aujourd’hui. Non pas que l’importance d’une doctrine doive se mesurer d’après la quantité de versets bibliques qui la développent. Mais ce qui est surprenant dans ce cas précis, c’est que si l’on ne s’en tient qu’aux données du texte biblique, rien ne nous permet de vouer à Marie un culte quelconque, encore moins de la faire monter au ciel et de faire d’elle une médiatrice et une co-rédemptrice avec le Christ ! Et cela au mépris de ce que l’apôtre Paul a expressément déclaré :

« Dieu est unique, unique aussi le médiateur entre Dieu et les hommes, le Christ Jésus homme lui-même qui s’est livré en rançon pour tous » (1 Timothée 2.5,6).

À en juger par la place qu’occupe Marie dans la religion d’aujourd’hui, on croirait volontiers que la Bible toute entière baigne dans sa personne ; on affirmerait que toutes ses pages sont imprégnées de sa présence ; on soutiendrait que les premiers chrétiens ne cessaient d’invoquer son intercession. Mais, comme nous venons de le voir, cette impression est loin de correspondre aux faits.

Aux noces de Cana, Marie avait dit aux serviteurs : « Tout ce qu’il vous dira, faites-le ». Si les hommes avaient suivi son conseil, s’ils avaient écouté l’exemple du Christ plutôt que la voix trompeuse de leur raisonnement humain, Marie serait toujours « la servante du Seigneur » que connaît l’Évangile, mais non pas la déesse des hommes et reine des cieux que l’Évangile ne connaît pas.

Un jour que Jésus enseignait la foule assise autour de lui, « sa mère et ses frères (Matthieu 12.46-50) se tenant dehors le firent demander… et on lui dit : Voilà que ta mère et tes frères et tes sœurs sont là dehors, qui te cherchent. Il leur répondit : Qui est ma mère ? Et mes frères ? Et, promenant son regard sur ceux qui étaient assis en rond autour de lui, il dit : Voici ma mère et mes frères. Quiconque fait la volonté de Dieu, celui-là est mon frère et ma sœur et ma mère. » (Marc 3.31-35)

L’attitude du Christ semble décourager tout intérêt qui n’est pas exclusivement orienté vers le Père. Un jour, élevant la voix du milieu de la foule, une femme extasiée lui dit :

« Heureux le sein qui t’a porté ! Heureuses les mamelles qui t’ont allaité ! Et il répondit : Heureux plutôt ceux qui écoutent la parole de Dieu et qui la gardent ! » (Luc 11.27,28)

Marie absente des épîtres

Jusqu’à présent, nous nous sommes presque uniquement limités aux données des Évangiles de Matthieu, Luc et Jean. Mais quel est le témoignage des épîtres ? Ici, les mentions de Marie sont pratiquement nulles. Vingt et une épîtres rédigées par les apôtres Pierre, Paul, Jude, Jacques. Vingt et une lettres couvrant environ les 70 premières années de l’Église, et Marie n’y est pas mentionnée une seule fois. Le centre de ces écrits inspirés de Dieu, c’est Christ le Sauveur, seul médiateur entre Dieu et les hommes.

L’apôtre Paul se contente d’écrire dans sa lettre « aux Galates » que « Dieu a envoyé son Fils, né d’une femme, né sous la loi » (Galates 4.4). C’est tout. C’est en somme un résumé en une phrase du récit des Évangiles qui commence d’ailleurs par ces mots : « Et voici comment Jésus-Christ fut engendré » (Matthieu 1.18).

Que penser de cela ? Quelle disproportion entre ce silence des premiers chrétiens et les clameurs d’aujourd’hui sur cette même question !

Comment Marie a-t-elle pu prendre une place aussi considérable dans la piété populaire, au point que si du jour au lendemain, le culte marial devait être aboli pour des raisons théologiques, la foi de millions de personnes sombrerait du même coup ?

Se pourrait-il que les hommes aient abandonné les Écritures pour mieux s’abandonner à leurs raisonnements sentimentaux ? Se pourrait-il qu’ils aient dédaigné le silence éloquent des épîtres sur cette question et jonglé avec quelques textes pour étayer leur raisonnement ?

Se pourrait-il que les hommes aient établi leur tradition au mépris et au détriment du commandement de Dieu (Marc 7.7-9) ?

Se pourrait-il enfin qu’ils aient pu commettre la double folie d’inventer ce que la Bible ne dit pas, pour lui faire dire ce qu’ils voudraient qu’elle dise, tout en taisant les enseignements qu’elle contient ?

L’humble servante

En lisant et en étudiant les Écritures, sans idées préconçues, gardons-nous d’aller au-delà du texte pour promouvoir artificiellement une doctrine qui nous tient à cœur, mais qui est issue de la pensée de l’homme. Aimons et respectons le souvenir de Marie qui a été la bienheureuse mère du Christ. Et si l’ange a annoncé qu’elle était comblée de grâce, ne nous hâtons pas de déduire des choses qui ne sont soutenues ni par l’attitude du Christ, ni par celle de tous les apôtres, ni par conséquent de toute l’Église du premier siècle. Car, en réalité, ce que l’ange a dit à Marie pourrait être traduit par ces mots : « Réjouis-toi, Privilégiée, le Seigneur est avec toi » (Audet-Revue biblique cité par Salvoni).

Et c’est à cause de ce privilège, de cette grande mission, que Marie glorifiait le Seigneur dont elle était et demeura l’humble servante. N’oublions pas en outre, que le centre, le fil conducteur, la raison d’être de toute la Bible, c’est le Christ notre Sauveur. C’est lui qui déclare une fois pour toutes :

« Je suis le chemin, la vérité et la vie. Nul ne vient au Père que par moi. » (Jean 14.6)

Richard ANDREJEWSKI
(Dans Vol. 3, No. 6)


Voir aussi Sans péché?.